TERRITOIRE DE KIBUYE

57 à 62. Le 7 novembre 1959 un agent de l’Etat apprend que des pillards sévissent à Rubengera, chefferie Bwishaza. Il les découvre en train de s’attaquer à la maison du sous-chef tutsi. Les pillards s’enfuient mais l’un d’eux un Hutu d’environ 50 ans, reste sur place à vouloir forcer une fenêtre sur laquelle il était monté. Il tente ensuite de s’enfuir et se dirige vers l’agent de l’Etat qui le prend par la chemise. Il se retourne et cherche à lui porter un coup de serpette à la tête. Celui-ci pare le coup avec sa mitraillette mais a l’auriculaire droit sectionné. Les indigènes qui accompagnaient l’agent de l’Etat se jetèrent sur le prévenu et lui donnèrent plusieurs coups de lance. Ce ne fut que grâce à l’intervention rapide de l’agent de l’Etat que le prévenu échappa à la mort et put être conduit, sous sa protection, à son véhicule (Cdg RU, 12/12/59, Président LAMY).

Outre cette affaire un certain nombre de Hutu furent arrêtés alors qu’ils faisaient partie de bandes qui dévastaient et pillaient des habitations tutsi.

58.Le 7 novembre 1959 à Murama, chefferie Kanage (Cdg RU, 19/3/60, Président LAMY).

59.Le 7 novembre 1959 à la sous-chefferie Kivumu, chefferie Budaha-Nyantango (Cdg RU, 23/3/60, Président LAMy).

60.Le 7 novembre 1959 à Mabanza, chefferie Bwishaza (Cdg RU, 12/4/60, Président LAMY).

61.Le 7 novembre 1959 à Kibaya, chefferie Bwishaza (Cdg Ruanda, 27/9/60).

62, Les 8 et 9 novembre à Mushubati, sous-chefferie Saramembe, chefferie Bwishaza (Cdg RU, 19/3/60, Président LAMY).

63 à 65. Dès le 7 novembre en chefferie Budaha-Nyantango ont lieu des réactions tutsi.

  1. Le 7 novembre à Shyogi un Hutu est surpris porteur d’une épée, soupçonné de faire partie d’une bande de pillards hutu, attaqué à coups de pierres et achevé d’un coup de lance. Le 9 novembre 1959 à Mungu, suivant un ordre donné la veille par certains leaders tutsi qui avaient conseillé de tuer tous les membres de l’Aprosoma qui avaient pris part aux incendies les jours précédents, une bande détruit complètement l’habitation d’un Hutu et s’empare de sa personne. Finalement celui-ci arrêté, frappé par la foule et ayant reçu des coups de lance, est sauvé par un violent orage qui disperse momentanément ses agresseurs (Cdg Ruanda, 10/1/61).
  2. Le 9 novembre 1959 à la sous-chefferie Ndeshye, l’habitation et la bananeraie d’un Hutu sont dévastées par une bande tutsi (Cdg Ruanda, 8/11/60).

65.En fin novembre 1959 en sous-chefferie Kivumu, le sous-chef tutsi menace un propagandiste Parmehutu de le tuer s’il continue à faire de la politique et, de plus, il lance le bruit que la guerre va recommencer (Cdg RU, 8/4/60, Président LAMY).

TERRITOIRE DE KISENYI

66 à 73. Des bandes de Hutu dévastent, pillent et incendient les habitations des Tutsi et parfois (affaires numéros 68 et 73) s’en prennent plus particulièrement aux biens des autorités coutumières. Dans certains cas (affaires numéros 67, 68 et 69), les prévenus ont affirmé qu’ils ont cru aux bruits circulant sur les collines, selon lesquels le Mwami avait ordonné de massacrer les Tutsi, réputés ennemis du Rwanda et des Européens. Le Conseil de guerre conclut (affaire numéro 67):

Il est certain que ces prévenus ont été pris par le mouvement de folie collective qui s’est abattu sur le Rwanda au début de novembre.

66.Le 6 novembre à Muhanda, chefferie Kingogo (Cdg RU, 29/4/60).

67.Le 6 novembre à la sous-chefferie Gitarama, chefferie Kingogo (Cdg RU, 30/12/59, Président GUFFENS).

68.Le 6 novembre à Rubare, chefferie Bushiru (Cdg RU, 15/6/60).

69.Le 7 novembre à la sous-chefferie Vumbi, chefferie Kanage (Cdg RU, 29/1/60, Président GUFFENS).

70.Le 7 novembre aux sous-chefferies Kagurube, Kasimoto et Karani, chefferie Kanage (Cdg RU, 25/1/60, Président LAMY).

71.Les 7 et 8 novembre en chefferie Bugoyi (Cdg RU, 30/12/59, Président GUFFENS).

72.Le 8 novembre à Busoro, chefferie Bugoyi (Cdg RU, 16/1/60, Président GUFFENS).

73.A Gatoke, chefferie Kanage, au début novembre (Cdg Ruanda, 20/12/60).

  1. Dans les journées des 7 et 8 novembre 1959, dans la partie sud du Bugoyi, on eut à déplorer la mort de dix indigènes et six autres furent plus au moins grièvement blessés.

Dans le Bugoyi, depuis déjà le 6 au soir, on craignait l’arrivée d’incendiaires hutu venant des chefferies ou des territoires voisins. Le sous-chef qui, en l’absence du chef du Bugoyi, remplisait les fonctions de chef, se rendit à Kisenyi pour signaler les dangers que courait le Bugoyi et demander du renfort pour se défendre. Malheureusement l’Administrateur de territoire de Kisenyi ne disposant que de forces assez réduites ne put accéder à cette demande et, lors d’une réunion qui eut lieu le soir du 6 novembre, le principe suivant fut admis: la défense personnelle et même par sous-chefferie était autorisée en cas d’attaque directe sur les maisons ou les personnes de la colline. Dans l’après-midi du 7 novembre les incendies des huttes de deux habitants de Budacyawa entraînèrent sur cette colline des réactions très vives. Un Hutu d’une autre sous-chefferie du Bugoyi fut arrêté et fut roué de coups par les gens de Budacyawa et par certains autres qui avaient été amenés de Kisenyi et d’ailleurs à Gatyaze dans un camion. Devant la réaction des gens de l’endroit et la vue de troupes venant de l’extérieur, les incendiaires cherchèrent à prendre la fuite du lieu où ils étaient en train de mettre le feu. Alors la poursuite des assaillants s’organisa.

Le Conseil de guerre conclut:

Il est certain que les représailles du 7 novembre n’ont pas été préparées et ne constituent qu’une très vive réaction particulièrement

cruelle. Celles-ci dépassaient les attaques puisque les incendiaires prenaient la fuite et qu’ayant pu être rejoints, les défenseurs qui les ont abattus auraient pu tout aussi aisément les appréhender pour les remettre aux autorités. Le dimanche 8 novembre dans la matinée les représailles qui eurent lieu dans les mêmes parages témoignent d’une action nettement plus concertée que la veille. En effet, de nombreux véhicules, camions, camionnettes et voitures se donnèrent rendez-vous à l’embranchement de Gatyaze venant de Kisenyi après avoir, en cours de route, recruté des hommes depuis surtout le centre extra-coutumier de Kisenyi qui procura une armée décidée de Swahili jusqu’aux gens qui circulaient sur la route et tout particulièrement à Rugerero. C’est ainsi qu’il y eut dimanche matin quatre morts à déplorer. Enfin une personne qui fut arrêtée presqu’en même temps que trois autres près de la brasserie Bralima fut achevée, semble-t-il, à Gatyaze, tandis que les autres n’eurent le bénéfice de vivre qu’à l’intervention d’un abbé et de deux assistantes sociales de passage qui les récupérèrent (Cdg RU, 15/4/60, Président LAMY).

La même affaire a donné lieu à un autre jugement du Conseil de guerre:

75.Cdg Ruanda, 18/10/60.

 

  1. A l’entrée de la cité indigène de Kisenyi, depuis le samedi 7 jusqu’au dimanche 8 novembre 1959, il y eut des barrages et plus particulièrement un barrage de pneus incendiés disposés au milieu de la route, entravant ainsi tant la circulation des habitants que celle des patrouilles de la Force Publique. Le Conseil de guerre conclut:

Appréciant la gravité des faits, il apparaît que la cité indigène de Kisenyi connut, lors de ces deux jours, un état de surexcitation très dangereux qui aurait pu avoir des conséquences beaucoup plus graves dans le cas où les forces de l’ordre qui patrouillaient sans cesse n’avaient pu, par leur présence constante, empêcher tout acte de violence plus grave (Cdg RU, 6/4/60, Président LAMY).

TERRITOIRE DE RUHENGERI

77 à 83. Des bandes de Hutu dévastent, pillent et incendient des habitations et des biens appartenant à des Tutsi. Dans un cas (affaire

numéro 78) les prévenus déclarèrent avoir obéi aux ordres de leaders qui leur avaient prétendu avoir reçu comme instruction de la part du Mwami d’incendier toutes les habitations des Tutsi de la région.

77.Le 6 novembre à Gakenke (Cdg RU, 11/12/59).

78.Le 6 novembre à Bisaga, sous-chefferie Gwerere (Cdg RU 11/12/59).

79.Le 6 novembre à Bwisha, chefferie Bukonya Bugalura (Cdg RU, 29/4/60).

80.Le 7 novembre à Muramba (Cdg RU, 11/12/59).

81.Le 9 novembre à Mubona (Cdg RU, 9/12/59, Président GUFFENS).

82.Le 9 novembre à Mubona (Cdg RU, 11/12/59).

83.Le 10 novembre à Cyuve (Cdg RU, 11/12/59).

  1. Le vendredi 6 novembre 1959 le sous-chef de Gitovu, chefferie Buberuka, fut tué d’un coup de lance porté par le prévenu. Le sous-chef avait été victime, ainsi que toute sa famille d’incendies et de pillages. Il rencontra un Hutu qui portait sur la tête un panier contenant sans doute des objets volés. Il l’appela mais celui-ci refusa d’obtempérer à ses ordres. Il le menaça de mort. En vain. Excédé, le sous-chef jeta sa lance sur lui et le blessa grièvement. La colline hurla au secours et les habitants se mirent à la poursuite du sous-chef qui, encerclé, jeta sa lance sur le prévenu et le manqua. Ce dernier se saisit de la lance et en blessa mortellement le sous-chef (Cdg RU, 13/5/60).
  2. Le 7 novembre 1959 à Rugarama, chefferie Mulera, un sous-chef et leader hutu circule en voiture, ayant reçu comme mission de l’Administrateur de territoire de se rendre auprès des populations pour arrêter les pillages et incendies. Il apprend qu’un important groupe tutsi se trouve à proximité et, prévoyant le danger, quitte sa voiture qui continue sans lui. Les Tutsi, furieux de ne pas trouver le leader hutu dans sa voiture, se précipitent, sous la direction des deux prévenus, à l’endroit où ils espèrent le trouver et, ne le découvrant pas, blessent à coups de bâtons et de lances un Hutu qu’ils y rencontrent (Cdg Ruanda, 9/5/61).