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  1. L’Eveil A La Civilisation Occidentale

La phase dernière de l’histoire du Ruanda, celle qui s’ouvre avec l’avènement de Rudahigwa, si aucun fait particulier et sensationnel ne la marque contrairement aux phases précédentes, se signale néanmoins par un renouveau général, par une entrée résolue et une marche ininterrompue dans la voie du progrès, par des transformations rapides, qui d’une année à l’autre ajoutent aux traits européens du pays et équivalent pour lui à une seconde naissance.

Les obstacles à l’action rénovatrice de la Puissance mandataire sont tombés. La hiérarchie indigène, et tous ses degrés, collabore maintenant avec loyauté, confiance, entrain, sérieux. La Belgique peut déployer sans entraves, sûre d’être comprise, les énergies de son âme civilisatrice, de son génie d’organisation, de son libéralisme éclairé ; elle n’hésite plus à investir dans le pays les capitaux nécessaires à sa mise en valeur. Le réseau de son contrôle administratif resserre ses mailles l’équipement économique s’enrichit chaque jour de quelque nouvel organe ; les institutions d’hygiène en lutte contre les agents de dépérissement de la race se multiplient ; les rudiments du savoir se diffusent comme une aube grandissante ; la population, grâce à une protection assidue de l’enfance, s’accroît à la cadence de trente, quarante et cinquante mille unités par an, assurant le doublement de son effectif en un tiers de siècle le volume des subsistances augmente au même rythme par la mise en culture des jachères et des marais.

Cette métamorphose s’accuse dans le pittoresque des costumes et du paysage. Quelques individualités, hommes et femmes, adoptent le vêtement européen en son entier. La presque totalité des gens qui s’habillent endossent des cottes ou longues blouses blanches, chaussent le seroual nord-africain, serrent autour de leur taille un pagne de couleur, se drapent dans le haïk de madapolam ou de mousseline. On croise aux lieux de rassemblement, les jours de fête surtout, de hautes silhouettes que l’on dirait costumées à l’antique, tels des figurants de tragédie grecque. La dignité grave de leur maintien et de leur démarche respire la noblesse de la statuaire classique.

Même aspect de renouveau dans le paysage. La campagne verte et mamelonnée se produit aujourd’hui, non seulement zébrée de raies grisâtres, routes et pistes se faufilant à travers les futaies d’eucalyptus et d’acacias, âgées à peine de quinze à vingt ans, mais encore piquetées aux flancs des cirques et sur le faîte de plateaux de taches rouges, les toitures des maisonnettes de brique. Ce n’est pas, en effet, le morne tembé oriental et musulman, le cube monotone de maçonnerie blanche, la geôle close et aveugle à terrasse, qui se blottit dans l’épais feuillage des bananeraies, mais le riant cottage latin au toit en bâtière, couvert de la tuile hémicylindrique, bordé d’un portique à l’avant et à l’arrière.

La Mission catholique a imprimé l’impulsion initiale des constructions en matériaux durables. Elle a fait surgir des façons d’abbayes médiévales en plein coeur de pays barbare. Ses stations constituent des îlots de vie européenne, affranchis de la laideur des échoppes hétéroclites et cosmopolites. L’administration a suivi, édifiant des bureaux hâtifs, des bungalows confortables et élégants dans des bosquets, noyaux de futures villes ; elle substitue aujourd’hui dans les gîtes d’étapes sur les routes des auberges de maçonnerie aux chalets primitifs à poteaux de bois et clayonnage ; elle bâtit des dispensaires ruraux sur le type des chapelles-écoles, leurs devancières, multipliées à la centaine. A leur tour les natifs aisés, piqués d’émulation, abandonnent la chaumière traditionnelle pour la maison méditerranéenne, requérant de l’obligeance des missionnaires plans, entrepreneurs, ouvriers qualifiés, ou se contentant du savoir-faire de leurs artisans novices. Les souverains s’accordent des châteaux à tours rondes, les grands chefs des villas à l’italienne ; les plus petits se contentent d’une modeste chartreuse. On voit parfois se grouper autour du manoir chapelle, cuisine, garage, laiterie, buanderie, communs divers, entourés d’un mur de clôture. Les simples ouvriers, employés, domestiques d’européens, ayant épargné quelques deniers, bâtissent eux mêmes ou se font bâtir par leurs congénères un home, où ils retrouveront le mieux-être dont ils ont bénéficié chez leur patron, au bureau ou à l’atelier.

Le Ruanda actuel est un immense chantier, morcelé en une mosaïque d’exploitations, grandes ou petites : villes, cités religieuses, mines, campements, habitations privées. Le quartzite et la limonite des carrières vole en éclat sous l’action des explosifs et vient s’enfouir dans les fondations L’argile des bas-fonds, pétrie dans les moules à brique, cuite dans les fours, monte en murs, tours, clochers sui les croupes et s’épanouit en ocre rouge ou jaune sur la toits.

Déjà des avenues de mimosas, de cyprès, de filaos conduisent droit aux parvis des résidences seigneuriales, et des parterres fleuris décorent leur cours d’entrée. Des coins de campagne européenne se trouvent ainsi plaqués sur la brousse primitive, l’égayant sans pour autant lui enlever son cachet propre.

D’autres images, encore que moins éblouissantes, se révèlent à l’observation comme autrement expressives d’une reviviscence atteignant jusqu’aux profondeurs intimés des âmes et consciences : lecteurs prenant connaissance des nouvelles dans leur périodique ou des messages manuscrits des autorités ; écoliers entrant en classe livres et cahiers sous le bras ; fidèles dans les églises et succursales suivant messe et cantiques dans leur paroissien.

Il se rencontre même des jeunes hommes, chefs, secrétaires, employés, qui pousseraient volontiers l’imitation des européens, leurs initiateurs, jusqu’à l’extrême, aspireraient à une assimilation totale avec eux. En natifs évolués et pleinement éduqués, ils auraient leur club fermé, leur langue, leurs banquets de sociétaires, leur petit parlement où toute question est agitée. Dans la vie privée, ils auraient soin que leurs femmes fussent vêtues, chapeautées, gantées, chaussées aux modes dernières de l’Occident. Des liaisons extraconjugales se substitueraient à la polygamie désuète. Leur tenue à l’église serait celle des mondains éclairés. Leur slogan est qu’ils ne doivent pas être exclus de la participation à l’égalité démocratique, proclamée chez eux par les blancs, pour un simple prétexte de couleur. Le public les nomme basilimu, en souahéli « les évolués », terme pris aujourd’hui en mauvaise part. Leur nombre se compte sur les doigts. Mais qu’ils puissent être une proie facile pour le nationalisme noir, xénophobe, subversif, nul n’en doute, et les autorités s’en montrent inquiètes.

Le mwami, encore qu’évolué plus que tous, n’est pas avec eux, pas plus que la presque unanimité de la caste dirigeante. Gagnés aux idées nouvelles, sympathiques à tous les progrès, ceux-ci entendent conserver du passé tout ce qui est viable, tout ce qui garde une valeur sociale, politique, artistique. Ils attendent d’un lent amalgame de l’antique culture autochtone _avec la civilisation occidentale chrétienne, une résultante originale, qui, plus aisément réalisable dans l’isolement relatif de ces blocs montagneux, préparerait à échéance plus ou moins éloignée un régime d’autonomie et d’association paritaire sur le plan économique et politique. Ce sentiment n’est pas seulement partagé par la plupart des nationaux capables de réflexion, mais encore par leurs éducateurs européens, ainsi qu’on en va juger par l’exposé de la politique indigène, suivie par ceux-ci. Cela posé, et cette seconde naissance du peuple ruandais dans un baptême de christianisme et de civilisation constatée, il convient d’en voir à l’oeuvre les auteurs européens, civils et ecclésiastiques, et d’en montrer la portée et les suites.

  1. Le Style Nouveau A La Cour

C’est au Palais, comme il va de soi après le bouleversement dont il venait d’être l’objet, que le changement fut le plus radical et le plus soudain, encore que le jeune mwami, sagement conseillé, eût à coeur de garder du passé tout ce qui était conciliable avec le bon sens, le bien de son peuple et sa nouvelle foi.

Bien entendu, tout ce qui fleurait le paganisme réprouvé, talismans, reliquaires d’ishyira, massue de fer fétiche, gourdes d’isubyo, cynocéphale, disparut comme par enchantement. Tout cet attirail avait dû prendre le chemin de Kamembe ; il n’en revint pas. Kalinga, le tambourin enseigne, était demeuré, mais on le déroba si parfaitement aux regards profanes que oncques plus personne n’en parla. La tourbe des devins, aruspices, sacrificateurs, envoûteurs, mages, s’était égaillé comme un vol d’oiseaux nocturnes ; ceux qui restaient, Abiru, Abakongori, Abagabe, durent se cantonner dorénavant dans leurs charges civiles.

Le feu de Gahinga s’éteignit dans sen amphore ; les huttes des grands monarques et des libérateurs nationaux, Ruganzu, Rwabugiri, Gihana, ne furent pas relevées. Rhapsodies et chroniqueurs héroïques, parasites et sportulaires habitués, frustrés désormais de la manne palatine, désapprirent le chemin de l’ibwami ou perdirent leur inspiration. Parentales annuelles, expiations pacificatrices, commercé avec les mânes, initiations secrètes au culte de Ryangombe, orgies sacrées, tout cela fut balayé comme feuilles mortes. Plus d’épouses de rechange placées sous la férule matronale de la reine mère. Celle-ci même, l’umugabekazi, ne résida plus au palais, et cessa de couvrir de ses ailes ou de tenir en laisse son auguste rejeton. Tout ce passé était répudié comme incompatible avec l’ordre nouveau et si totale était la révolution spirituelle accomplie déjà dans les âmes que cette dérogation aux usages séculaires, loin de diminuer le novateur aux yeux de ses sujets, ne fit que l’accréditer davantage.

Pour le reste rien n’est changé à l’étiquette. Honneurs, cérémonial, divertissements traditionnels sont maintenus. La diane des tambourins continue, soir et matin, à révéler la présence du maître. Les grands visitent à tour de rôle l’ibwami et stationnent à son entrée. Les batwa dansent et les bouffons amusent la galerie. Mais tout cela a perdu sa couleur de jadis, surtout depuis que le mwami, au déclin de 1933, a quitté la hutte pour s’installer dans la résidence que la Puissance mandataire lui a édifiée sur sa même colline de Rwesero, une noble et longue bâtisse précédée d’un perron et d’une galerie couverte, sur laquelle ouvre une rangée de portes vitrées. Le mwami moderne pilote lui-même sa voiture, la plus luxueuse et la plus rapide du Ruanda, voyage seul, s’il lui en prend fantaisie, chasse au fusil lions et léopards. Il s’est marié, non selon le protocole, mais selon son inclination, le 15 octobre 1933 à Shyogwe chez sa mère, et il ne fait pas mystère qu’il veut être l’époux d’une seule femme. Il ne l’a point choisie parmi les Bega, clan de sa mère et de sa grand-mère, quelque pression qu’on exerçât sur lui à ce propos. Il n’oublie pas que les Bega ont des comptes à rendre aux Banyiginya, clan de la dynastie, qu’ils ont spoliés et presque exterminés. Il se doit, sinon de les abaisser, du moins de ne pas les élever davantage. Il s’est marié dans le clan des Bagesera dans la famille détrônée du Kisaka. Nyiramakomari, sa jeune femme, est fille de Kadogo, chef, de la dynastie, descendant de l’illustre Kimenyi Getura. A sa mère, Kankazi Nyiramavugo, « Celle qui parle bien », il a maintenu honneurs, tambourins, essaim de courtisans, mais il lui a ôté la réalité du pouvoir. Ainsi le voulait l’adaptation à la conjoncture, et cette révolution dans la constitution du royaume n’est pas la moindre entre tant d’autres. Il lui a constitué un douaire au Marangara à Shyogwe, avec une dotation de collines, de mainmortables, de bovins. Il l’a logée dans un castel, dont Mgr Classe a tracé le plan et assuré l’exécution, face à Kabgayi. On dirait d’un Pierrefonds réduit à trois grosses tours rondes en poivrière, qu’enveloppe un mur d’enceinte dessinant un trèfle polylobé. C’est une réplique en maçonnerie de l’ancien ibwami. L’Augusta, épouse royale répudiée, y retrouve la retraite silencieuse et discrète, le clair-obscur, de sa précédente chaumine. Elle y vit à l’européenne dans des pièces décorées avec goût, entourée de ses soeurs, des filles mariées de Musinga, de ses nièces, qui se relaient auprès d’elle comme dames de compagnie. Le roi, sa femme, sa mère sont catholiques romains, croyants, instruits, fervents. S’ils ne sont point encore baptisés ce n’est point que l’ardent désir leur en fasse défaut. La prudence chrétienne, fondée ici sur la tyrannie des usages, trop souvent victorieuse des résistances individuelles, qui contraint à un remariage le souverain auquel sa première épouse n’a pas donné de postérité mâle, induit le pasteur responsable du troupeau ruandais à imposer à la famille royale des délais douloureux, au demeurant résignés. « Nous demandons à Dieu, écrivait en 1936 Mgr Classe au sujet de son pupille princier, de nous le conserver tel qu’il est, bon, juste pour tous ses sujets, grands et petits, affable, dévoué et généreux pour la Mission, simple et de jugement droit. Il s’intéresse à l’avancement de son pays et à la stabilité des foyers. Que Dieu lui accorde un héritier mâle, et il pourra recevoir ce baptême qu’il désire si vivement, baptême que -seule dette question – capitale d’hérédité retarde ». La mère sera baptisée avec le fils, l’épouse avec l’époux.

Mutara veut faire de Nyanza une vraie capitale, la capitale authentiquement indigène. De semi-nomades qu’étaient ses prédécesseurs, il devient, lui, délibérément un sédentaire, encore qu’il ait des pied-à-terre dans toutes les parties du royaume. Il a déjà sa station et son église paroissiale provisoire. Un couvent de religieuses sort en 1939 de ses fondations avec écoles pour les filles. Demain s’édifiera avec son aide financière un temple en rapport avec l’importance du lieu. Frères et Soeurs noirs s’établiront à leur tour. Un hôpital vient de s’ouvrir grâce aux soins de l’Administration mandataire. Le prince, gentilhomme fermier, a ouvert une laiterie modèle, créé une porcherie. Un quartier est réservé au commerce, foirail quotidien, boutiques de mercantis, dépôt d’essence. Nyanza fera sous peu figure d’agglomération urbaine sur le rang de Kigali et d’Astrida.

  1. La Tutelle Du Mwami, Chef De La Hiérarchie Féodale

 Le mwami a pris virilement en mains l’oeuvre à lui confiée de la renaissance politique du pays. Il a conscience que dans la mesure même où il agira de concert avec la Puissance mandataire, il restera réellement le chef de son peuple. L’oligarchie gouvernante échappait à Musinga et inclinait à se rallier directement à l’autorité protectrice. Mutara l’a ressaisie. Il est porté d’emblée en tête de la colonne ; c’est bien lui qui lui sert aujourd’hui de guide national. La Belgique a besoin de son prestige, du principe qu’il représente, de sa légitimité, pour mener à bien sa tâche régénératrice. Au lieu de paralyser ses initiatives, elle les encourage et au besoin les suscite. Un courant de confiance s’est établi entre la Résidence et la Cour. Rudahigwa se sent d’autant plus stable qu’il est plus assidu à sa tâche, telle que ses tuteurs la lui suggèrent. Le mwami ne fait plus la guerre, plus de campagnes de razzias ; plus de conquêtes en perspective. Il n’a plus d’armée, ni même de police. Mais il rend la justice, son banc est une Cour suprême pour les causes civiles, il juge d’après le droit coutumier. Il est, comme par le passé, assisté dans ses plaids, par les pairs du royaume, présents momentanément à la cour ; le délégué dé la Résidence à Nyanza siège à son tribunal comme commissaire de la Puissance protectrice. Les causes criminelles, et toutes celles où un européen et un asiatique sont parties, sont seules soustraites à sa juridiction. Les chefs restent ses vassaux et ses feudataires. S’il ne peut plus les destituer et les investir à son gré, il les contrôle ; il les visite d’office dans des tournées d’inspection. Dans les cas de sanctions à prendre et de promotions à décider il a voix au chapitre auprès de la Résidence, et ses propositions comme ses avis sont tenus en haute estime. Pour l’aider dans sa gestion la Puissance mandataire plaça auprès de lui dès son avènement un corps de conseillers choisis pour la plupart dans sa parenté. « Son jeune âge, dit le Rapport de 1935, — il avait à peine vingt et un ans, — et l’appréhension des autorités de le voir en butte à l’opposition de certains chefs influents attachés à l’ancien régime, amenèrent le Résident à former un collège de notables ‘de grande famille, connus pour leur intégrité et leur expérience, dont la mission serait d’aider et de guider le haut dignitaire dans sa tâche, très délicate, d’arbitre et dans les devoirs complexes de la politique indigène. Ces notables résident à tour de rôle pendant un mois environ auprès du mwami et l’accompagnent dans ses déplacements. Leur nombre, qui était de quatre depuis 1931, sera porté à six au début de l’année 1936. » Dans le fait Rudahigwa ne prend réellement conseil que du fils de Kabare, cousin germain de son père, le mwega Francisco Rwabutogo, et de Raphaël Serukenyinkware, du clan des Basinga, ancien pontife à la cour de Musinga, bien revenu de son ancienne crédulité, témoin autorisé des vieux temps.

Maintenu comme haut suzerain, chef suprême de la hiérarchie féodale, posesseur en haut domaine de toutes les terres et de tout le bétail, du royaume, il a consenti à la conversion de ses droits seigneuriaux, de ses redevances en nature, en une contribution en espèces. Sur l’impôt global indigène de la capitation, payé par tout adulte, mâle capable de travail, il reçoit une ristourne, de soixante-quinze centimes, sur la taxe frappant toutes les bêtes cornes une ristourne de vingt-cinq centimes. En outre dans son domaine propre du Nduga-Marangara, il perçoit les droits de chef de province dont il fait fonction. Il possède enfin un immense cheptel pâturant au Nduga et au Buganza, qu’il gère par l’organe de ses grands vachers. Ses revenus fiscaux ou autres font de lui le personnage le mieux renté du Ruanda. Il peut ainsi tenir honorablement son rang et conserver tout son prestige auprès de ses sujets grands et petits. Ceux-ci, en effet, encore imprégnés des conceptions du régime féodal, ne peuvent imaginer que celui qui a tout le pouvoir n’ait pas aussi tout l’avoir.

Que la Belgique ait trouvé dans le fils de Musinga l’auxiliaire souhaité pour l’accomplissement de sa mission, le témoignage qu’elle rendait de ses comportements en 1935 à la Commission permanente des Mandats en fait foi. Elle communiquait : Mutura Rudahigwa continue à mériter la confiance et les éloges du Gouvernement, qui, sans que le mwami en tire aucune vanité l’entoure d’une grande considération.

« Dans ses rapports avec l’Administration, il montre beaucoup de bon sens et émet des avis qui s’inspirent de l’équité et s’appuient sur une bonne connaissance des coutumes indigènes. Dans ses relations avec les chefs, il sait écouter et comprendre, il fait siennes leurs demandes ou propositions, lorsqu’elles lui paraissent justifiées, mais il sait aussi se faire obéir, si la nécessité s’en fait sentir. Avec les indigènes il est accueillant, il écoute patiemment leurs réclamations et y fait droit, s’il échet.

« Comme les années précédentes, il a visité tous les territoires de sa principauté, s’intéressant à tout et réglant de nombreux litiges. Le contrôle personnel qu’il exerce à cette occasion sur l’activité des chefs s’avère attentif et efficace.

« Lors des incidents qui troublèrent pendant un temps le territoire de Nyanza au cours des opérations de la vaccination antivariolique, — trois ou quatre cents montagnards avaient envahi en armes le camp médical par haine des batutsi, clamant que le vaccin avait été rendu par eux méchamment nocif et refusant pour cela de se laisser traiter, — Rudahigwa joua un rôle de premier plan, calmant les esprits et faisant rentrer ces gens excités dans leurs foyers. Il consacra plus d’un mois à séjourner dans la région en effervescence. »

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