1. Comment s’appellent l’enfant, avec les frères de sa mère?

+Hirwa soeur de RUGIRA, a un fils, RUGAZA. Comment désigne-t-on la relation de parenté existant entre ce dernier et son oncle RUGIRA ? RUGAZA appellera RUGIRA (et BUGABO) :marume = ma-mère-mâle, c’est-à-dire mon oncle maternel.  Tandis que RUGIRA appellera RUGAZA : mwishywa wanjye = fils de ma soeur, au pluriel bishywa banjye/bacu.

(Ma-rume, (abréviation de mama-rume), pour la 1ere personne des deux nombres : Ma-mère-mâle et Notre-mère-mâle.

2e personne : nyoko-rome — ta-mère-mâle et votre-mère-mâle.

 3e personne : nyira-rume = sa-mère-mâle et leur-mère-mâle.)

 

  1. Comment s’appellent mutuellement l’enfant et la soeur de sa mère? Hirwa, mère de RUGAZA, a une soeur Gakima. Comment les deux dernières personnes s’appellent-elles mutuellement ? RUGAZA dira de + Gakima : mama-wacu = ma-mère-notre ; tandis que sa tante dira de RUGAZA : umwana wanjye = enfant de moi (mon enfant), sans autre précision.

(1ère personne : mama-wacu = ma-mère-notre et notre-mère-notre.

2e personne : nyoko-wanyu = ta-mère-votre et votre-mère-votre.

3e personne : nyina-wabo = sa-mère-leur et leur-mère-leur.)

 

  1. Comment s’appellent mutuellement les enfants de frère et soeur?

RUGAZA est fils de + Hirwa. Les frères de cette dernière, à savoir RUGIRA et BUGABO, ont ensemble quatre enfants. Comment chacun de ces quatre derniers appelle-t-il RUGAZA, et réciproquement ? RUGAZA dira d’eux et chacun d’eux dira de RUGAZA : mubyara wanjye, au pluriel babyara banjye = enfant de la soeur de mon père (enfant du frère de ma mère).

 

  1. Comment s’appellent mutuellement les enfants de deux soeurs? a) RUGAZA est fils de + Hirwa ; Gakima, soeur de cette dernière, a une fille : Humura. Celle-ci et RUGAZA s’appellent réciproquement : mwene-mama-wacu = l’enfant ma-mère-notre:

(1ère personne : mwene-mama-wacu : l’enfant-de-ma-mère-notre et enfant de-notre-mère-notre.

2e personne : mwene-nyoko-wanyu : l’enfant-de-ta-mère-votre, et enfant de-votre-mère-votre.

3e personne : mwene-nyina-wabo enfant-de-sa-mère-leur, et enfant-de- leur-mère-leur ).

b) On remarquera donc que la relation ici exprimée, diffère de celle que RUGAZA d’une part, et + Humura d’autre part, ont respectivement avec les 4 enfants de leurs oncles maternels.

 

  1. Comment s’appellent mutuellement deux frères?

RUGIRA et BUGABO, fils de MUTWA, sont les seuls frères figurant sur cette table généalogique. Comment désigne-t-on cette relation ?

a) L’un dit de l’autre : mwene-mama = fils de ma mère.

b) L’aîné, RUGIRA, est : mukuru wa = le grand-frère de (BUGABO).

c) Le cadet, BUGABO, est : murumuna wa = petitfrère de (RUGIRA).

d) Étant donné qu’ils ont la même mère, ils sont : ibyenenyina.

e) S’ils avaient le même père, et deux mères différentes, l’un dirait de l’autre : mwene-data = l’enfant-de mon-père.

f) S’ils avaient une même mère et deux pères différents, ils seraient toujours ibyene-nyina ; mais on préciserait basangiye nyina = ils-ont-commune-mère (sous-entendu : donc les pères sont différents).

 

  1. Comment un père appelle-t-il ses enfants?

RUGIRA appelle + Gato et SEBASHI : abana banjye ; au singulier : umwana wanjye. Il les désigne, suivant le sexe : + Gato = umukwobwa wanjye = ma fille; littéralement : ma fiançable ; au pluriel abakwobwa banjye. Il appelle SEBASHI : umuhungu wanjye : mon fils ;  au pluriel abahungu banjye, littéralement : héritier de mes veuves (le verbe guhungura = épouser la veuve d’un parent).

  1. Comment un homme appelle-t-il les enfants de son frère? a) RUGIRA appelle + Kabera : umukwobwa-wacu = la fille-notre. Il appelle NTWALI : umuhungu-wacu = le fils-notre. Il est entendu que BUGABO emploie les mêmes termes vis-à-vis de + Gato et de SEBASHI. b) Mais ces termes umuhungu-wacu et umukwobwa wacu n’ont pas en ce sens la forme du pluriel ; si la forme du pluriel était employée sans un correctif quelconque, la signification en serait modifiée (On peut apporter ce correctif de plusieurs manières ; par exemple en disant : Sebashi na Ntwali, ndababye : ni abahungu-bacu = Sebashi et Ntwali, je les engendre : ils sont mes-fils-notre. (L’expression : je les engendre, veut dire : je leur suis généalogiquement antérieurs). En supprimant ce correctif, le pluriel modifie la signification en ce sens que le discours conviendrait entre le père et la mère du foyer, qui parleraient de leurs enfants. )
  2. Comment les enfants appellent-ils le frère de leur père?

+ Gato et SEBASHI appellent BUGABO : data-wacu = mon père-notre (A partir d’ici, le lecteur pourra découvrir de lui-même les composants de dénominations qui renferment data et mama. Il se rappellera que ces deux termes font respectivement so et nyoko à la 2e personne, ainsi que se et nyina à la 3eme. Il suffit ensuite d’y ajouter la particule nouvelle qui en modifie la signification initiale.)  ; et réciproquement + Kabera et NTWALI, vis-à-vis de RUGIRA.

  1. Comment les enfants appellent-ils leurs cousins germains paternels? Gato et SEBASHI appellent + Kabera (et NTWALI) : mwene-data-wacu = l’enfant de mon-père-notre au pluriel : bene-data-wacu ; et réciproquement.
  2. Comment les enfants appellent-ils la femme de leur oncle paternel? a) + Gato et SEBASHI appellent la femme-D, épouse de BUGABO : mama-wacu = ma-mère-notre ; et réciproquement + Kabera et NTWALI vis-à-vis de la femme-Z, épouse de RUGIRA. b) Cette dénomination de ma-mère-notre ne dépend pas du fait que la femme en question ait des enfants : la seule condition requise est qu’elle soit mariée à l’oncle paternel :
  3. Comment une femme appelle-t-elle le frère de son mari?

La femme-Z (épouse de RUGIRA) appelle BUGABO : umugabo-wacu = le mari-notre ; et réciproquement la femme-D (épouse de BUGABO) vis-à-vis de RUGIRA.

40. Comment un homme appelle-t-il la femme de son frère?

RUGIRA appelle la femme-D (épouse de BUGABO) umugore-wacu = la femme-notre.

41. A propos de cette terminologie de ma-mère-notre (mama-wacu), mon-père-notre (daata-wacu), le mari-notre (umugabo-wacu), la femme-notre (umugore-wacu), et autres de ce genre, il importe de rectifier la tendance de certains ethnologues qui croient pouvoir traduire : notre mère, notre père, notre mari, notre femme, etc. Cette dernière façon de traduire nos termes africains relève de la structure européenne, qui ne correspond pas exactement à la structure bantu. Quelques exemples suffiront pour faire mieux saisir ma pensée.

42. Prenons le mot : data-wacu. Supposons que je le traduise ainsi : notre père. Cette traduction comporterait deux inexactitudes :

a) Le mot data signifie : mon père. C’est-à-dire qu’il renferme en lui toute les déterminations possibles, et qu’il exclut l’adjectif possessif « mon » qu’on lui ajouterait. Lors donc que le possessif ‘wacu‘ (première personne du pluriel) qui signifie notre, est adjoint à ce mot data, qui devient data-wacu, on ne peut le traduire autrement qu’en donnant tout le contenu du composé ; à savoir : d’abord mon-père, et ensuite notre: mon-père-notre. b) La traduction française : notre père, exprimerait l’idée de deux ou plusieurs enfants qui parlent de leur père commun. Ceux qui parlent sont donc au pluriel. Tandis que la formule africaine data-wacu s’extériorise dans une structure différente : elle sert pour le singulier et le pluriel de la première personne :

1° Si un seul enfant parle: data-wacu = mon-pèrenotre (mon oncle paternel).

2°  Si plusieurs le désignent ainsi : data-wacu = notre-père-notre. Dans l’une et l’autre supposition, le possessif mien (notre) doit se mettre à la fin du nom composé qu’est data-wacu, sans jamais adopter la forme du singulier  wanjye (mon).

43. a) Le mot data (mon père) est par la force même des choses au singulier. Je sais que dans la structure européenne on dira : nos pères, mais il n’est plus, en ce cas, question de père dans le sens qui nous occupe ici ; à savoir la relation personnelle existant par voie de génération, entre deux individus : le père et son enfant.

b) Or, dans la structure rwandaise, pour dire nos pères, c’est-à-dire nos aïeux, on ne peut pas utiliser le terme data, qui est tout à fait particulier ; on se sert en ces cas du mot Abasekuruza.

  1. Comment font les enfants qui, en groupe, parlent de leurs pères respectifs? a) Nous avons vu que data signifie aussi bien monpère que notre-père, à la première personne des deux nombres. Il s’agit alors soit d’un individu ou soit de plusieurs, qui ne parlent que d’un seul père. Si maintenant les individus sont nombreux, et parlent de leurs pères respectifs, ils diront ainsi : ba-data = les-notre-père. Ex. : ba-data baraje = les notre-père viennent. ba-data-wacu: les-notre-père-notre c’est-à-dire nos oncles paternels. C’est la particule ba- qui nous indique ainsi que data est au pluriel, tandis que ce terme restera inchangé sous tous les rapports. b) Il est certainement drôle de dire : les-mon-père (les-notre-père), et surtout les-mon-père-notre (les-notre-père-notre). Mais nous n’y pouvons rien : il s’agit d’un concept qu’il faut rendre en français, en le faisant sortir de son contexte culturel, au sein duquel personne ne songe même à l’analyser sous cet aspect. On admettra du reste que les appellations de beau-père et de belle-mère, si naturelles en d’autres structures, ne nous semblent pas plus appropriées, par rapport au concept que ces mots veulent rendre.
  2. Ce que nous venons de dire, au sujet de data, vaut également, et pour les mêmes raisons, pour le terme mama, qui renferme en sa propre notion la détermination complète : mama = ma-mère. Tous les éléments qui viendront s’ajouter à ce terme, le trouveront déjà complet, avec sa signification indépendante. D’où mama-wacu, ne pourra pas se traduire : notre-mère, mais bien d’abord : mama = ma-mère ; puis wacu = notre- Ma-mère-notre. C’est dans cette structure qu’il faut traduire les termes exprimant les degrés de parenté et d’affinité au sein du groupe envisagé.
  3. Peut-on se marier entre parents consanguins?

Nous venons de détailler les relations de consanguinité et d’affinité. Terminons cette longue énumération par l’indication de quelques règles concernant les possibilités ou les empêchements de mariage entre parents consanguins. Le principe général a été formulé plus haut : on ne peut se marier à l’intérieur de son clan, à moins d’être membre du clan dynastique. Mais, par la force même de cette règle générale de l’exogamie clanique, il s’établit un enchevêtrement inextricable de relations du sang entre divers clans. Voilà pourquoi il fallait introduire d’autres règles pratiques, complétant le principe totémique.

47. Pour plus de clarté, distinguons ici la licence de se marier, et la non-interdiction religieuse d’avoir des rapports sexuels. Il y a une grande différence, en effet, entre se marier, et pouvoir entretenir, en privé, le commerce prohibé. Par exemple, si tel membre du clan des Basindi descendant de Yuhi III Mazimpaka, ne peut pas se marier dans le clan des Bacyaba, cela ne signifie pas qu’il lui soit par le fait même interdit d’entretenir des relations coupables avec une femme de ce groupe. Le mariage, comme nous allons le voir, comporte des rites déterminés, sans lesquels la jeune fille restera légalement telle, malgré le fait qu’elle vivrait avec un homme. L’interdiction donc du mariage, au point de vue de notre coutume, concerne l’accomplissement de ces rites. Ainsi, pour se marier, on consulte préalablement les devins, mais on ne le fait pas pour aller commettre l’adultère.

48. Il fallait bien souligner ce point. En ce qui concerne les parents consanguins, en effet, non seulement le mariage est interdit, mais encore cette interdiction comporte la défense de relations coupables ; agir contrairement à cette interdiction, c’est commettre l’inceste et s’exposer aux sanctions spéciales supposées inhérentes, d’une manière automatique, à cette abomination.

  1. 1°. Un cas que n’a pas prévu le principe général du totémisme.
  2. a) Frère et soeur. — Il est interdit aux frères et soeurs, non seulement de se marier, mais encore d’avoir des relations coupables. Ne pas se marier : c’est ici une défense relevant du totémisme. Ces deux personnes visées appartiennent au même clan. L’interdiction de l’inceste découle-t-elle de la même structure ? Je ne crois pas ; car les membres du même clan (répondant au même totem), ne se respectent probablement pas comme ceux de la même famille ni à plus forte raison comme ceux de la même hutte. Dans les deux derniers cas, l’inceste est tellement avilissant, que si le coupable est publiquement connu, il déchoit moralement du rang qu’il tenait en son milieu. On peut même dire que cette déconsidération, par un processus psychologique naturel, se trouve être l’origine de certaines formes de ces sanctions soi-disant automatiques. Lorsque tel individu est déconsidéré en son propre cercle social, il serait bien difficile que cette déchéance n’ait pas des répercussions dans d’autres domaines, y compris celui des biens de la fortune, relevant de supérieurs extrêmement influençables.

b) Lorsqu’on parle de frère et soeur, l’idée obvie qui se présente à l’esprit, est celle de personnes issues d’un même père, ou d’une même mère ; peu importe donc que les enfants aient eu deux pères différents, ou deux mères différentes. Le totémisme est par ce fait en défaut, en ce qui concerne l’empêchement matrimonial; que faire, en effet, si les deux enfants ont une même mère, et deux pères répondant à deux totems différents ? En ce dernier cas, le frère pourrait donc épouser sa sœur, sans être inquiété ! Le principe de la consanguinité, relevant heureusement d’une structure extrato-témique, intervient pour interdire formellement pareille union, comme étant incestueuse.

  1. Le résumé des autres interdictions de mariage et de rapports coupables.

Nous devons donc retenir que l’interdiction de mariage ne signifie pas nécessairement interdiction de relations sexuelles. Le mariage est réglementé par la loi du totem, et c’est en ce sens que, provisoirement du moins, nous appelons cette défense totémique. Tandis que l’interdiction, ordonnée à écarter l’inceste, semble relever d’une autre structure juxtaposée à la première et la complétant. Cette dernière conception en la matière, s’applique à trois catégories de femmes, que désignent les trois formules suivantes de serment : a) Ndakambura abakuru ! = Un homme emploiera cette formule de serment, pour étayer inébranlablement la vérité de ses dires. La formule signifie : Que je déshabille mes ascendantes ! (sous-entendu : si je mens !). Déshabiller, c’est un euphémisme pour : avoir des relations sexuelles. Un serment prêté en ces termes est considéré comme très sérieux, et ce serait une provocation injurieuse que de mettre en doute la véracité de celui qui parle de la sorte. Par ascendantes, il faut entendre toutes les femmes du même degré de parenté que la mère et les tantes maternelles de l’intéressé, et toutes celles des degrés supérieurs. Il peut arriver, en effet, qu’un homme ait des parentes, même très jeunes, mais correspondant, par étages généalogiques, à sa grand-mère, paternelle ou maternelle.

b) Ndakambura abana = Que je déshabille mes enfants (filles). Il faut ici comprendre par enfants, n’importe quelle femme dont l’intéressé est père, oncle, ou grand-oncle paternel. C’est-à-dire, toutes les femmes de sa famille, classées généalogiquement au-dessous de sa propre génération.

c) Ndakambura abishywa = Que je déshabille les descendantes de mes soeurs ! — Nous avons vu que, par rapport à un homme, l’enfant de sa soeur est mwishywa, au pluriel bishywa (no 29). Sous cette forme, le mot n’a pas le préfixe u au singulier (umwishywa), et a au pluriel ( abishywa). Il s’agit alors de la première génération issue de la soeur. Les descendants de la soeur, considérés collectivement à tous les degrés, sont désignés par le même terme, mais cette fois-ci muni dudit préfixe : umwishywa, au pluriel abishywa. (Remarquez que ce mot umwishywa, au pluriel abishywa, diffère doublement de umwishywa, au pluriel imyishywa — la momordique (chap. V, no 8, 30). D’abord par la tonalité, et ensuite par la classe ; cette dernière différence est mise en vedette par les deux pluriels ; la forme aba ( ab’ishywa ) étant propre aux êtres raisonnables. )

Voilà donc les trois catégories de femmes qu’il n’est pas permis, non seulement d’épouser, mais encore d’approcher en ce qui regarde les relations sexuelles.

  1. a) Il est entendu que la femme, de son côté, brandit les mêmes formules de serment. Dans sa bouche, la formule exclut les hommes de son ascendance, de sa descendance, et de la descendance de son frère. En ce qui concerne ces derniers, elle ne dira cependant pas Ndakambura abisengeneza ; mais Ndakanbura abana = mes enfants. b) Notons cependant que cette formule de serment est très discrètement employée chez les Batutsi (Hamites). Ils ne s’en serviront qu’avec leurs familiers, et s’en abstiendront en public, parce qu’elle n’est pas du langage châtié. L’usage en est, par contre, général dans le peuple.

53. Signalons enfin, que le mariage est interdit, ainsi que les relations sexuelles, entre les cousins enfants de deux soeurs ; à savoir, sur notre table généalogique, RUGAZA et + Humura. Comme nous y avons fait allusion plus haut, peu importe qu’il n’appartiennent pas au même clan. Issus de deux soeurs, ils sont considérés comme frère et soeur entre eux.

 54. Le cas où le mariage est permis entre consanguins. Les cousins-babyara, c’est-à-dire enfants de frère et soeur, peuvent se marier ; sur notre table généalogique : RUGAZA peut épouser Gato et + Kabera, filles de ses oncles maternels. De même, SEBASHI et NTWALI peuvent épouser + Humura, fille de leur tante paternelle.

55. Comment expliquer que le mariage soit permis entre les enfants de frère et soeur, et cependant interdit entre les enfants de deux soeurs ? Pouvons-nous recourir au motif si évident, qu’entre les enfants de frère et soeur, les clans sont différents ? Mais dans ce cas on peut répliquer qu’entre les enfants de deux soeurs, le clan n’est pas nécessairement identique. Il arrive très souvent (on peut même dire que c’est le cas le plus normal) que les enfants de deux soeurs appartiennent à des clans différents. Le clan pouvant cependant être différent, mais ne l’étant pas nécessairement, la gravité des sanctions inhérentes à l’inceste aurait-elle déterminé l’interdiction, pour raison de sécurité ? Cette réponse n’est évidemment pas satisfaisante ; les Basindi sur lesquels ne pèse pas l’interdiction de l’endogamie clanique, considèrent également comme leurs sœurs, les cousines qui nous occupent ici.

56. La réponse la plus exacte semble être la suivante : nous nous trouvons ici en présence d’une disposition du système matriarcal qui fut jadis en vigueur en nos régions. L’interdiction des mariages à l’intérieur du clan, combinée avec le fait de perpétuer le clan par la descendance matrilinéale, aboutit à la défense de ces unions entre les enfants de deux sœurs.

  1. Un homme peut-il épouser la fille de son cousin- mubyara? Les cousins-babyara, avons-nous vu, peuvent se marier. Prenons en exemple NTWALI et sa cousine-mubyara  Humura. Si cette dernière se marie et qu’elle a une fille, peut-elle la donner en mariage à NTWALI ? En d’autres mots : le mariage est-il permis, à partir du deuxième degré des cousins-babyara, à échelons inégaux ? Répondons tout d’abord que je n’ai connu aucun cas de ce genre. Il existe cependant un axiome populaire, formulant la règle en cette matière : ababyara babyalirana abageni=  les cousins enfants de frère et soeur engendrent des épouses l’un pour l’autre. En vertu de cette règle indiscutable, NTWALI peut, non seulement s’unir à + Humura, mais encore à la fille de celle-ci ; à condition, bien entendu, que + Humura ait eu cette fille d’un mari appartenant à un clan autre que celui des Bagesera dont se réclame NTWALI.

Je crois que nous avons ainsi épuisé toutes les suppositions qu’il est possible de formuler, au sujet des degrés de consanguinité et d’affinité, pouvant influencer le mariage ou en résulter.