Les deux premières expéditions du Ruanda contre Ntamwete.

Nous avons vu que, sous le règne du dernier Kimenyi, le Ruanda conduisit contre le Gisaka – dans les années 1750 à 1770 – trois expéditions militaires d’envergure (igitero)

Après la liquidation de l’aventure de Rugeyo et le retour de Ntamwete au Gisaka, le Ruanda reprit sa marche vers l’Est. Mais, comme le Gisaka se trouvait scindé en principautés – en apparence alliées, en réalité rivales – les dirigeants banyaruanda eurent la sagesse de concentrer leurs efforts sur une seule de ces principautés : le Gihunya.

La première expédition ordonnée contre le Gisaka par le Mwami Mutara II Rwogera eut lieu aux environs de 1835. Voici ce que l’on croit en savoir.
Le nom qu’on lui donna fut « Karaminwe » (geste des mains exprimant la stupéfaction). Ce fut une expédition apparemment dirigée contre les trois provinces du Gisaka, mais, en fait, tout son poids porta sur le Gihunya. A la tête de l’expédition, le Mwami Mutara II Rwogera avait placé Nyiramakuza, commandant en chef duNgabo du Nduga. Ce corps d’armée passe par Rwamagana, sans s’y attarder et se dirige par Ntaruka (Kayonza), sur Gahini et Rukara (direction Nord). L’expédition ne semble donc pas avoir pour objectif le Gisaka, et, rassurés, les éclaireurs Barasa se retirent vers leur ligne de défense : Kabarondo-Kirwa.

C’est alors que les banyaruanda exécutent, à la faveur de la nuit, un rapide mouvement de conversion en direction du Sud, culbutant au lever du jour les avant-postes de Ntamwete disposés entre Kayonza et Kabarondo et se scindent ensuite en deux colonnes, l’une progressant vers le Migongo (direction Buliba), l’autre vers le Gihunya (direction Birenga). En même temps, un détachement d’arrière-garde, resté dissimulé dans les environs de Rwamagana, fond sur le Mirenge.
Désarroi des banyagisaka.
Au Migongo et au Mirenge, les troupes ruandaises se contentent d’occuper les premières hauteurs et de tenir en respect les forces adverses. Mais la colonne centrale, ainsi protégée sur ses flancs, traversera le Gihunya, du Nord au Sud (jusqu’au Butama inclusivement), pour s’en retirer le jour suivant – par le même chemin – chargée d’un lourd butin.
Telle fut la première expédition de Rwogera.

A quelque temps de là – vers 1840 sans doute – eut lieu la deuxième expédition : on la baptisera « Mukanigo ka Nkingi», c.-à-d. « au col de Nkingi ».
Cette fois-ci, la tendance à dissocier les principautés du Gisaka apparaît plus nettement encore : l’expédition sera dirigée contre le Gihunya exclusivement.
Dès avant le déclenchement des opérations, Ntamwete est alerté par ses espions. Le Mwami Rwogera charge de l’expédition le ngabo du Buganza Est, dénommé « Akabemba » et placé sous le commandement de Rwihimba fils de Kabaka (le ruandais), lui-même fils de Kavotwa et petit-fils de ce Sharangabo (fils du Mwami Cyilima Rujugira et frère du Mwami Kigeri Ndabarassa), qui dirigea les deux premières expéditions ruandaises contre le dernier Mwami du Gisaka.

Guère sûr de son parent et allié Rushenyi, chef du Mirenge (dont la défense au cours de la précédente campagne avait été plus que molle), Ntamwete entreprend – à la limite des collines Nshiri (au Nord) et de Mbuye (au Sud), au col de Nkingi – l’érection d’une formidable palissade (mutamenwa) allant du lac Sake (à l’Ouest) au marais Cyahafi, qui sépare la colline Mbuye de la colline Matongo (à l’Est). Ainsi, Ntamwete allait disposer à Mbuye d’un immense camp retranché de 8.300 hectares de superficie, protégé au Sud par la Kagera, à l’Est par un marais de près d’un kilomètre de largeur, à l’Ouest par un lac et au Nord par une infranchissable palissade.

Dès que l’armée ennemie a été signalée aux confins du Gisaka, femmes, vieillards, enfants et bovidés sont massés à l’intérieur du camp retranché de Mbuye, au lieu-dit de Murwa, hors de la portée des flèches. Les combattants Barasa sont disposés le long de la palissade, sur plusieurs rangs, avec des réserves en profondeur. Puis, on attend.
L’armée de Rwihimba passe par Kirwa, Kigarama, Munege. Ensuite, son quartier général s’installe sur la colline de Gisera, avec une couverture de protection en direction du Mirenge, sur les collines contiguës de Ngoma de et Nshiri.

Alors, le gros de l’armée ruandaise se scinde en deux colonnes d’assaut. L’une, conduite par Rwihimba en personne, attaque de front la palissade du col de Nkingi. L’autre opère un mouvement tournant par l’Est, donc sur le flanc droit des Barasa. Elle se glisse subreptice-ment vers le marais de Cyahafi, se fraye un passage dans les fourrés de Nyamizi (lieu-dit en contrebas du Nkingi) et prend les assiégés à revers. La surprise est totale et la défaite des Barasa presque immédiate. Ntamwete réussit à s’enfuir en Urundi, sur une barque, mais son chef d’armée, Gasana, est capturé.
A aucun moment, les Bahadigwa du Mirenge n’ont fait mine d’intervenir et c’est en toute quiétude que les banyaruanda se retireront vers le Buganza, chargés d’un butin plus riche encore que celui qu’ils avaient rapporté de l’expédition précédente.

Luttes de Ntamwete contre Mushongore et contre Rushenyi.

A la suite des deux expéditions guerrières du Ruanda dont il avait fait les frais, Ntamwete s’était trouvé en piètre posture, tant sur le plan militaire que sur le plan économique. Aussi son cousin Mushongore estima-t-il l’heure venue de se débarrasser de sa tutelle politique et comme Ntamwete, malgré tout, manifestait quelque velléité de maintenir son autorité de Chef Suprême du Gisaka, Mushongore n’hésita pas à fondre sur le Gihunya et ses troupes fraîches écrasèrent, en quelques jours, les restes de l’armée des Barasa.

Mushongore s’empara alors de la personne de Ntamwete et – ce qui plus est – du tambour Rukurura. Ntamwete est bientôt remis en liberté, contre un renoncement solennel – devant ses Base ( « Abase » (au singulier « umuse »). Ce terme kinyarwanda se traduit « témoins solennels» ou « légalisateurs ». En dialecte gisakien, son pendant est : « abitira » (au singulier « umwitira »). Ainsi, les « base » des Banyiginya sont les Bagesera basangwabutaka et les Bazigaba. Les base – ou bitira – des Bagesera bazirankende seraient les Bungura. Le rôle traditionnel des baseconsiste à sanctionner par leur présence aux cérémonies (imigenzo) le caractère solennel et irrécusable de celles-ci. A ne pas confondre les Bitira et les Base avec les Biru)- à toute primauté politique ; puis, le Rukurura est processionnellement conduit au Migongo et installé au sommet de la pierreuse colline de Remera qui domine un splendide panorama de lacs. (Remera est située à 2 Km à vol d’oiseau, de la Mission catholique de Nyarubuye, fondée en 1944). Ainsi, les rôles se trouvent renversés et c’est la famille de Ntamwete qui devient – en fait, sinon en droit – vassale de la famille de Mushongore.

Défait, dépossédé de ses dernières vaches et réduit en sujétion par le Chef du Migongo, le Chef du Gihunya chercha des compensations (surtout pastorales) du côté de ce Mirenge dont le Chef, Rushenyi, s’était abstenu de le soutenir, tant contre les banyaruanda que contre les Bahilika.
Mushongore ne fit aucune difficulté pour laisser à Ntamwete les mains libres à l’Ouest se disant, sans doute, que l’affaiblissement mutuel des armées des deux autres principautés gisakiennes ne pourra que le servir.

Cependant, les événements ne vinrent point confirmer ses prévisions, Rushenyi – trop faible, ou trop lâche pour se défendre – ayant préféré s’incliner sans coup férir devant l’ultimatum que lui avait envoyé Ntamwete. Il se rendit à Birenga (Gihunya centre-Sud), résidence principale de Ntamwete, et là, il se laissa imposer un pacte de soi-disant non-agression, à des conditions désastreuses : il perdait les trois-quarts du Mirenge, dont la quasi totalité de ses pâturages et de ses terres à ruches ; il ne gardait que quelques collines sans importance, dans les environs immédiats du lac Mugesera.

Ce pacte conclu, Ntamwete plaça à la tête des terres prélevées sur le Mirenge l’un de ses courtisans, appelé Shikiri, qu’il choisit entre tous parce qu’il était le pire ennemi personnel de Rushenyi.
Dans ces conditions, la soumission de Rushenyi et de sa nombreuse clientèle ne pouvait être que précaire. Et nous verrons qu’à la première occasion propice, le Mirenge s’insurgera contre ses oppresseurs, quitte à faire délibérément le jeu du Ruanda.
Cette occasion cependant, ne se présentera pas de si tôt et quatre nouvelles expéditions ruandaises seront encore lancées contre le Gihunya avant que Rushenyi ne se décide à passer ouvertement à l’ennemi.

Les quatre expéditions intermédiaires du Ruanda contre Ntamwete.

Vers 1845 eut lieu la troisième expédition de Rwogera Rwamwiza (« Rwogera le Beau ») contre le Gihunya. Elle passa à la postérité sous le nom de « Kuka Bashumba», de «Bashumba», lieu-dit situé sur le versant dénommé Giseri de la colline Kigarama.

Les Ntaganzwa sous le commandement de Marara et les Babito sous le commandement de Nyankiko – ce dernier chef de l’expédition – arrivent par leur voie habituelle, de Kirwa vers Kigarama.
Les Barasa les attendent à Giseri, ayant à leur tête l’umusita Kabaka, son frère Mafubu et le muzigaba Mazuru, fils de Kibogo. Un engagement a lieu, que la nuit arrête, à un moment où le sort des armées est encore indécis. Les deux armées campent face l’une à l’autre.

Au lever du jour, Nyankiko fait crier un message au camp adverse : « N’y a-t-il personne parmi vous qui veuille se charger d’une communication pour Ntamwete ? ». On lui rétorque : « Qui es-tu toi-même ? ». Et il répond : «Je suis Nyankiko, fils de Rugambwa. Mon surnom de guerre est Umuhinduranshuro wa Ruhetandeweke (c’est-à-dire « celui qui brise toutes les attaques de sa lance irrésistible))). Et toi-même qui commandes en face, qui es-tu ? ». Alors Nyankiko entend la voix d’en face : «Je suis Kabaka, fils de Kayagiro. Mon surnom de guerre est Rugambarara ingamba zilinze (c’est-à-dire « celui qui reste impavide dans la bataille »). Et Nyankiko de reprendre : « Fais savoir à ton maître que le Gisaka n’est qu’une motte de terre à laquelle Rwamwiza heurte son pied. Ne penses-tu pas que, demain ou après-demain, son pied finira par aplatir cette motte ? Ne serait-il pas sage de se soumettre dès aujourd’hui ? ». Mais Kabaka, se dressant de toute sa haute taille et brandissant un faisceau de flèches au bout de son bras levé, riposte aussitôt : « Regarde bien ! Quand ces traits et tous ceux dont mes guerriers disposent auront été épuisés, alors seulement Ntamwete, mon maître, servira le tien».
Devant une attitude aussi résolue, Nyankiko aurait jugé plus raisonnable – affirment les gisakiens (Murunganwa, Nyirindekwe, etc…) – de rebrousser chemin sur-le-champ. Quant aux banyaruanda – (Rukara, Birasa, etc.) – ils assurent que Nyankiko n’opéra alors qu’une retraite feinte, afin de donner le temps à son train de bagages (vivres et réserve d’armes) de le rejoindre et qu’aussitôt ravitaillé, il reprit sa progression vers le Sud, repoussant les Barasa et réussissant une importante razzia de bétail.
Quoiqu’il en soit, les troupes ruandaises ne s’attardèrent point dans le pays et – en se retirant – laissèrent pas mal des leurs sur le carreau.

L’expédition suivante – la quatrième -aura plus d’envergure. Elle se déclenche quelque trois ans après la précédente (vers 1848 ?) et bénéficie d’une minutieuse préparation. On la désignera par l’appellation « cya Rususa », du nom de la colline qui fut choisie comme point de ralliement pour les diverses armées ruandaises qui devaient y prendre part.
Le nombre inusité de celles-ci marquait assez l’ampleur des objectifs assignés à cette expédition, dont le commandant en chef fut Nkoronko, le propre frère du Mwami Rwogera.
Les Babito sous la conduite de Nyankiko ; les Ntaganzwa, sous les ordres de Nyirimigabo, fils de Marara ; les Ruyange, sous les ordres de Giharamagara, fils de Rwakagara – descendent de Muhulire sur Rususa, en avant-garde.

Les Bakwiye et les Bashakamba, placés sous le commandement de Rwampembwe, fils de Nkusi, passent par Gitaraga, Rulenge, Kamugundu et Musya. Les Mvejuru, sous les ordres de Rugeleka (assisté par Rubabazangabo) ainsi que les Nzirabwoba, commandés directement par Nkoronko, passent par Remera, Kabare et Kabuye. Ensuite, Abakwiye et Abashakamba d’une part, Mvejuru et Inzirabwoba d’autre part, opèrent leur jonction au bas de Rususa et s’y cantonnent ; tandis que les trois armées d’avant-garde dépassent déjà cette colline et s’avancent, sans précautions, vers l’ennemi.

Le but de cette manoeuvre était de faire croire, aux gens du Gihunya à une avance imprudente des banyaruanda et de les inciter à tenter un encerclement. La ruse réussit, car les Barasa s’étant placés, par un mou-ement tournant, sur les arrières des envahisseurs, furent rapidement transformés d’encercleurs en encerclés, par l’intervention du gros des forces ruandaises.

Pris entre le parti de Nyankiko (qui a fait volte-face) et le groupe d’armées de Nkoronko (dont les effectifs ont brusquement dévalé de Rususa), Ntamwete à la tête de ses Barasa, fait piètre figure. Son second, Kabaka, est grièvement blessé, ses troupes perdent pied et lui-même, une fois de plus, est contraint de chercher son salut dans la fuite. Ilabat d’un coup de lance Musamura (fils de Rwamaganza et chef de clan des Balejuru) qui tentait de lui barrer la route et, après une longue course, se réfugie avec les siens dans le bosquet qui lui servait de camp retranché, à l’abri d’une triple ligne de lanières de peau de vache, formant toile d’araignée autour des épineux.

Comme après le désastre de Nkingi, les banyaruanda sont maîtres de tout le Gihunya. Ils le pilleront systématiquement, sans que ni Sebakara (enchanté des revers de Ntamwete), ni Mushongore (soulagé de ne pas avoir été inquiété lui-même) fassent mine d’intervenir.

Les troupes ruandaises passent quelques semaines dans le Gihunya sans découvrir la cachette de Ntamwete ; puis, devant une saison de sécheresse particulièrement inclémente, elles rebroussent chemin, emmenant avec elles, à la tête d’une multitude d’autres bovidés, la plus belle vache que le Gisaka ait jamais possédée : Ikotaniro.

L’extraordinaire perfection de formes de cette Ikotaniro était si renommée dans tous les pays hamites, qu’à la Cour du Ruanda, sa prise avait été considérée comme digne de constituer l’un des deux enjeux de la campagne projetée, l’autre étant… la capture de Ntamwete lui-même.

Chacun des Chefs d’armées désignés pour prendre part à l’expédition avait parié qu’il ramènerait Ikotaniro à la Reine-Mère Nyiramavugo et le général de l’armée Uruyange, qui gagna le pari, fut royalement récompensé.
Une année ne se passe pas (nous sommes en fin 1849 ou début 1850) que les banyaruanda montent contre le Gihunya un raid-éclair. Les effectifs sont modestes, mais aguerris et entraînés aux marches rapides.

A la tête de cette cinquième expédition, le Mwami Rwogera a placé Nshabirwa, fils de Nyulira, général des Bakemba, assisté par Imono, fils de Ndori et par Baziga, fils de Rubaba. L’objectif choisi est Birenga, résidence principale de Ntamwete, mais c’est « Nyaruhoni», lieu-dit situé entre Ngara et Munege, qui donnera son nom à l’expédition.

Les banyaruanda, profitant d’une nuit particulièrement sombre, trompent la vigilance des postes-frontières Barasa et suivent l’itinéraire que voici : Kirwa, Kigarama, Kansana, Rwambohero, Gashanda. En ce dernier lieu, arrivés au gikingi (propriété pastorale héréditaire) d’un certain Mafubo, fils de Nkangiki, ils rencontrent une vive résistance de la part de ce notable et de ses gens.
Furieux du contretemps, les banyaruanda incendient la propriété de Mafubo et cette imprudence leur vaut l’échec de toute leur entreprise. En effet, le gros de l’armée des Barasa, qui se trouvait au repos à Birenga, est alerté par ses veilleurs, alarmés par les flammes d’un grandiose incendie. Aussitôt Ntamwete entraîne ses troupes dans cette direction, leur fait contourner Rubambantare et prend à revers les banyaruanda qui, entretemps, étaient arrivés à Nyaruhoni. Les guerriers banyaruanda, voyant le chemin de la retraite coupé et ayant à lutter à un contre quatre, sont bientôt pris de panique et cherchent le salut dans une fuite désordonnée. Les trois chefs banyaruanda perdent la vie dans cet engagement et leurs crânes, montés sur des pieux de l’enceinte princière de Birenga, y resteront exposés jusqu’à la mort de Ntamwete lui-même.

Le résultat malheureux de sa 5èmeexpédition contre le Gihunya et la nouvelle que Ntamwete prépare une campagne de revanche – cependant que le Ruanda doit faire face à d’autres difficultés – tout cela ensemble incite Rwogera à recourir à de grands moyens : à la tête d’une sixième expédition -qui se situe vers 1851 – il place un mutabazi appelé Ntabyera, umutsobe apparenté de près au Mwami. Cette expédition prendra son nom.

Ntabyera et sa troupe pénètrent au Gihunya par Gasetsa et Rulenge. A Kabungo (lieu-dit sur la colline Musya) ils provoquent, au lever du jour, une rencontre d’armes avec un avant-poste de Barasa. Ntabyera, victime propitiatoire, tombe bientôt, frappé à mort par la lance d’un certain Semusambi, fils de Kanyamulinja. En examinant le cadavre, Semusambi constate avec stupeur qu’il porte les insignes du mutabazi : une plume de nganji à la tête, une petite gourde de forme spéciale et deux grosses lances vierges derrière le dos.

On prévient Ntamwete qui se fait apporter la dépouille mortelle du héros. Au même moment, se présentent devant lui deux parlementaires banyaruanda, Ntavuranga et Sebihembe, lesquels confirment au prince qu’il s’agit bien là du corps d’un mutabazi et ils concluent : « Soumets-toi au Mwami, car – sans cela – ta fin est proche ».

Ntamwete (son nom semble prédestiné, puisqu’il signifie « l’homme affaibli », « l’homme de la défaite ») hésite. Il est déjà prêt à s’incliner devant le sort. Mais son favori Shikiri lui fait honte : « Un tambour peut-il régner sur un autre tambour ? » s’exclame-t-il.
Alors Ntamwete se ressaisit. Il renvoie, sans aménité les parlementaires banyaruanda et appelle à l’aide son cousin et suzerain Mushongore, Prince du Migongo, celui-là même qui lui a ravi ce Tambour dynastique au nom duquel il veut, à présent, poursuivre la lutte.
Quant à Rushenyi, ci-devant Prince du Mirenge, dépossédé par Ntamwete de la plupart de ses terres, il apprend avec joie la mort du mutabazi ruandais, et jugeant l’heure de sa revanche enfin venue, court offrir ses services au Mwami Rwogera, alors en expédition dans le Nduga.