Histoire: Définitions

– Connaissance et récit des événements du passé jugés dignes de mémoire ; les faits ainsi relatés,
– Mémoire que la postérité conserve des faits et des personnages du passé, sorte de jugement qui semble découler de cette sélection : un personnage dont l’histoire a retenu le nom : RUKARA RWA BISHINGWE
– Suite des événements, des faits réels, des états marquant l’évolution d’un groupe humain, d’un personnage, d’un aspect de l’activité humaine, etc : s’intéresser à l’histoire d’une région, d’une ville.
– Ouvrage de caractère historique, relatif à telle chose, tel personnage, dû à tel auteur : L’Histoire du Rwanda par Alexis KAGAME.

L’histoire, souvent écrit avec la première lettre majuscule, est à la fois l’étude et l’écriture des faits et des événements passés quelles que soient leur variété et leur complexité ; on désigne aussi couramment sous le terme d’histoire (par synecdoque) le passé lui-même, comme dans les leçons de l’histoire. L’histoire est un récit écrit par lequel des hommes et des femmes (les historiens et historiennes) s’efforcent de faire connaître les temps révolus. Ces tentatives ne sont jamais entièrement indépendantes de conditionnements étrangers au domaine telle que la vision du monde de leur auteur ou de sa culture, mais elles sont censées être élaborées à partir de sources plutôt que guidées par la spéculation ou l’idéologie.

En français, le mot histoire a plusieurs sens, mais dans tous les cas il renvoie à l’idée de récit, soit sur des événements fictifs, soit sur des événements réels :
-Histoire que l’on raconte (conte, légende. ..)
-Histoire d’un peuple ou d’un pays
Même quand on parle de l’histoire qui concerne les événements du passé, on peut distinguer deux choses :
– Les événements objectifs eux-mêmes
– Le récit ou la science sur ces événements
Au deuxième sens, il y a une dimension symbolique dans la mesure où s’opère une réflexion sur les événements.
On retrouve cette distinction entre la réalité objective et la science qui l’étudie dans d’autres disciplines: géographie, économie, droit… L’homme agit et fait réflexion sur ces actions. Il cherche à leur donner un sens.

I/ Fondements et origines de l’histoire
1. Pourquoi 1’homme s’intéresse t il à son passé ?

La mémoire
Tous les êtres vivants subissent le temps et se transforment au cours de temps. Mais seul l’homme a la conscience de ce passage et a la possibilité de s’en souvenir. De ce fait, il peut réfléchir à son passé et chercher à lui donner un sens. Depuis toujours, l’homme a cherché à garder une trace de son passé, en utilisant notamment des moyens tels que les monuments, les musées, les livres etc., ce que l’animal ne fait pas.
Le modèle.
On peut remarquer que pendant longtemps les hommes ont vu dans leur passé un modèle. Le passé servait d’idéal et l’on considérait toujours que la société était meilleure dans le passé. C’est l’idée de la société décadente et le mythe de l’âge d’or.
On trouve alors une idéalisation du passé qui ne va s’atténuer qu’au XVIIIème siècle avec l’apparition de l’idée de progrès.
La causalité
On peut aussi s’intéresser au passé pour y rechercher des causes aux événements actuels. Il y a un lien entre la notion de temporalité et la notion de causalité: la cause arrive avant l’effet. Pour comprendre les événements actuels, on a besoin de rechercher leurs causes dans les événements du passé :
Réunification de l’Allemagne (guerre froide, deuxième guerre mondiale etc.)

2. Naissance et développement de la connaissance historique

L’écriture
Tous les peuples ont des traditions orales sous la forme de légendes ou de mythes.
Mais l’histoire comme science suppose un support écrit. La mémoire suppose l’oubli car elle se préoccupe davantage du présent. On peut mentir dans l’écriture mais seule l’écriture peut donner une forme d’objectivité. Depuis l’invention de l’écriture, les hommes ont consigné leur passé par écrit.

Texte de Marrou (De la connaissance historique. 1954)
Dans ce texte, Marrou s’interroge sur l’utilité de l’histoire en tant que science et commence par la définir comme « la connaissance du passé humain ». Ensuite il montre en quoi cette définition permet d’opposer l’histoire à d’autres domaines. Page 2 sur 6

-Ainsi tout d’abord l’histoire selon lui s’oppose à tout travail de type littéraire. En effet, l’histoire existe déjà dans l’esprit de l’historien avant même qu’il ne l’écrive, même si histoire suppose un travail écrit. Ce sont donc deux activités logiquement distinctes.
– D’autre part l’histoire est bien une connaissance et non pas une recherche ou une étude et à ce propos Marrou précise que c’est bien le premier sens du mot «historia » (recherche, enquête). La recherche ou les études sont le moyen qu’utilise l’histoire et ce n’est pas le but de l’histoire comme science. L’histoire se doit d’élaborer une connaissance valide.

De ce point de vue de l’histoire s’oppose à toute représentation fausse ou imaginaire de type roman historique ou tradition.
– Enfin il conclut finalement que, de ce point de vue, la connaissance historique est un idéal dont l’historien doit s’efforcer de se rapprocher. C’est pourquoi il affine sa définition en disant que l’histoire est “la connaissance scientifiquement élaborée du passé” c’est-à-dire qu’il oppose l’histoire à «la connaissance vulgaire de l’expérience quotidiennes” parce qu’elle est une “connaissance élaborée en fonction d’une méthode systématique et rigoureuse ». Il travaille de façon à pouvoir se donner le maximum de moyens d’attendre la vérité.

La rationalité
A proprement parler, les Grecs ont été les premiers véritables historiens à éliminer de l’histoire tout le surnaturel et on ne s’intéressant qu’à la réalité. (Thucydide, Vème siècle av. JC est considéré comme le premier historien)
Le travail des historiens est avant tout d’écarter toutes les sources d’informations douteuses. Ainsi historien utilise toujours le progrès technique pour améliorer scientifiquement ses méthodes de recherche. Par exemple, on utilise actuellement le carbone 14 pour dater des documents, quel qu’il soit. Ainsi, 1’histoire se rapproche des sciences.
D’autre part, le champ de recherche de l’histoire s’est élargi de plus en plus. Plus on fait de découvertes, plus on prend de recul dans l’histoire.

Aujourd’hui, on analyse de plus en plus loin dans la préhistoire et on s’intéresse à la totalité des pays du monde et non plus seulement à l’Europe.
D’autre part, on étudie maintenant la vie quotidienne de tous les individus et pas seulement les individus des dans le pouvoir.

III/ La Question du sens de l’histoire.
En français, le mot sens renvoie à la notion de signification et à une idée de direction vers laquelle on se dirige. Dans le cas de l’histoire, les deux sens de confondent.

1. Négation du sens de l’histoire
On peut penser que l’histoire est absurde dans la mesure où les hommes répètent toujours les mêmes erreurs. Ainsi chaque guerre doit être la dernière et toujours une autre guerre arrive. En outre, qu’on peut se demander dans quel but ont lieu tous les événements historiques puisqu’ils se répètent. Toujours dans l’histoire, on voit se répéter les mêmes horreurs. On peut également remarquer que dans l’histoire, le hasard joue un très grand rôle. En effet, certains événements arrivent suite à concours de circonstances imprévisible.

2. Affirmation d’un sens de l’histoire
Dans la mesure où on n’est jamais revenu au modèle préhistorique des ou certaines choses évoluent péniblement fil du temps pour les hommes.

a) L’idée de providence
Dans toutes les religions créationnistes, un Dieu fixe le point de départ du monde et guide les hommes dans tous les événements qui vont arriver.
En ce sens, le Dieu aurait par avance un idée très précise de ce à quoi il destine les hommes et ceux-ci devraient s’en remettre à sa volonté.

b) L’idée de progrès
L’idée de progrès suppose une philosophie de l’histoire athée.
-Dans le domaine des techniques, il y a un évident progrès technique même si les conséquences en sont parfois néfastes
-Politique: jamais autant d’hommes sur terre n’ont vécu libres
MAIS, en même temps, jamais les totalitarismes n’ont été aussi puissants.

En conclusion on peut constater que dans certains domaines la morale ou l’économie par exemple le progrès est très discutable.
Texte de Kant et de Rousseau Page 5 sur 6

Mais, quand les difficultés qui environnent toutes ces questions laisseraient quelque lieu de disputer sur cette différence de l’homme et de l’animal, il y aune autre qualité très spécifique qui les distingue, et sur laquelle il ne peut y avoir de contestation; c’est la faculté de se perfectionner, faculté qui, à l’ aide des circonstances, développe successivement toutes les autres, et réside parmi nous tant dans l’espèce que dans l’individu, au lieu qu’un animal est au bout de quelques mois ce qu’il sera toute sa vie, et son espèce au bout de mille ans ce qu’ elle était la première année de ces mille ans-

Pourquoi l’homme seul est-il sujet à devenir imbécile N’est-ce point qu’il retourne ainsi à son état primitif, et que, tandis que la bête, qui n’a rien acquis et qui n’a rien non plus à perdre, reste toujours avec son instinct, l’homme, reperdant par la vieillesse ou d’autres accidents tout ce que sa perfectibilité lui avait fait acquérir, retombe ainsi plus bas que la bête même?
Il serait triste pour nous d’être forcés de convenir que cette faculté distinctive et presque illimitée est la source de tous les malheurs de l’homme; et que c’est elle qui le tire à force de temps de cette condition originaire dans laquelle il coulerait des jours tranquilles et innocents, que c’est elle qui, faisant éclore avec les siècles ses lumières et ses erreurs, ses vices et ses vertus, le rend à la longue tyran de lui-même et de la nature.

Rousseau, Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes
L’histoire est la reconstitution, par et pour les vivants, de la vie des morts. Elle naît donc de l’intérêt actuel que des hommes pensant, souffrant, agissant, trouvent à explorer le passé. Recherche d’un ancêtre dont le prestige et la gloire se prolongent jusqu’au présent, éloge des vertus qui firent naître et prospérer la cité, récit des malheurs voulus par les dieux ou appelés par les fautes des humains qui en précipitèrent la ruine, la mémoire collective comme la mémoire de l’individu part de la fiction, mythe ou légende, et se fraye péniblement un chemin vers la réalité. Que la fraîcheur des souvenirs ne nous abuse pas : la fidélité des souvenirs et une vertu de la jeunesse.

La science historique commence […] en réagissant contre les transfigurations imaginatives du passé. On s’efforce d’établir ou de reconstruire les faits selon les techniques les plus rigoureuses, on fixe la chronologie, on prend les mythes eux-mêmes et les légendes comme objets afin d’arriver à la tradition et, par-delà, à l’événement qui leur ont donné naissance, bref, pour reprendre la formule fameuse de Ranke1, l’ambition suprême de l’histoire est de savoir et de faire savoir wie es geschehen ist, comment cela s’est passé.

La réalité pure, tel est son objectif dernier, son objectif unique.
1 historien allemand (1795-1886)
On sait aujourd’hui à quels résultats considérables aboutit l’effort de plusieurs générations d’historiens rompus aux méthodes de la critique historique. Grâce à ces conquêtes de la science, en dépit des immenses lacunes de notre savoir, notre civilisation, pour la première fois dans l’histoire, s’est formée une image de la plupart des civilisations mortes. Elle se situe elle-même, vivante parmi des mortes, consciente de sa singularité et de sa fragilité.

Certes aucun historien n’arrive aujourd’hui à dominer l’ensemble des matériaux accumulés. Le triomphe de la science historique entraîne celui des spécialistes. L’unité de l’histoire se perd dans la multiplicité des disciplines, chacune limitée à un fragment des siècles ou à un secteur des sociétés disparues. Mais qu’importe cette dispersion ? Elle est le revers ou plutôt la consécration de la science : il n’en va pas autrement pur les sciences de la nature. Le temps de l’encyclopédie est révolu et chacun s’accommode de sa limitation. Il reste que le passé, évanoui dans le néant mais partiellement fixé dans les monuments et les écrits, a été peu à peu reconstitué dans ses dimensions exactes, dans ses perspectives infiniment variées, par la curiosité patiente des générations.
R. Aron, Dimensions de la conscience historiques Page 6 sur 6

Le moyen dont la nature se sert pour mener à bien le développement de toutes ses dispositions est leur antagonisme au sein de la Société, pour autant que celui-ci est cependant enfin de compte la cause d’une ordonnance régulière de cette Société.
J’entends ici par antagonisme l’insociable sociabilité des hommes, c’est-à-dire leur inclination à entrer en société, inclination qui est cependant doublée d’une répulsion générale à le faire, menaçant constamment de désagréger cette société. L’homme a un penchant à s’associer, car dans un tel état, il se sent plus qu’homme par le développement de ses dispositions naturelles. Mais il manifeste aussi une grande propension à se détacher (s’isoler), car il trouve en même temps en lui le caractère d’insociabilité qui le pousse à vouloir tout diriger dans son sens et, de ce fait, il s’attend à rencontrer des résistances de tous côtés, de même qu’il se sait par lui-même enclin à résister aux autres.

C’est cette résistance qui éveille toutes les forces de l’homme, le porte à surmonter son inclination à la paresse, et, sous l’impulsion de l’ambition, de l’instinct de domination ou de cupidité, à se frayer une place parmi ses compagnons qu’il supporte de mauvais gré, mais dont il ne peut se passer. L’homme a alors parcouru les premiers pas qui, de la grossièreté, le mènent à la culture dont le fondement véritable est la valeur sociale de l’homme ; c’est alors que se développent peu à peu tous les talents, que se forme le goût, et que même, cette évolution vers la clarté se poursuivant, commence à se fonder une forme de pensée qui peut, avec le temps, transformer la grossière disposition naturelle au discernement moral en des principes pratiques déterminés.

Kant, Idée d’une histoire universelle au point de vue cosmopolitique 4ème proposition
Qu’est-ce dont que l’histoire ? Je proposerais de répondre : L’histoire est la connaissance du passé humain. L’utilité pratique d’une telle discussion est de résumer dans une brève formule l’apport des discussions et gloses qu’elle aura provoquées. Commentons-la :
Nous dirons connaissance et non pas comme tels autres, «narration du passé humain», ou encore «oeuvre littéraire visant à la retracer» ; sans doute le travail historique doit normalement aboutir à une oeuvre écrite […] mais il s’agit là d’une exigence de caractère pratique (la mission sociale de l’historien…) : de fait, l’histoire existe déjà parfaitement élaborée dans la pensée de l’historien avant même qu’il l’ait écrite ; qu’elles que puissent être les interférences des deux types d’activités, elles sont logiquement distinctes.
Nous dirons connaissance et non pas, comme d’autres, «recherche» ou «étude» (bien que ce sens d’enquête soit le premier sens du mot car c’est confondre la fin et les moyens ; ce qui, importe c’est le résultat atteint par la recherche : nous ne la poursuivrions pas si elle ne devait pas aboutir ; l’histoire se définit par la vérité qu’elle se montre capable d’élaborer. car en disant connaissance, nous entendons connaissance valide, vraie : l’histoire s’oppose par là à ce qui serait, à ce qui est représentation fausse ou falsifiée, irréelle du passé, à l’utopie, à l’histoire imaginaire […], au roman historique, au mythe, aux traditions populaires ou aux légendes pédagogiques – ce passé en images d’Epinal que l’orgueil des grands Etats modernes inculque dès l’école primaire, à l’âme innocente de ses futurs citoyens.

Sans doute cette vérité de la connaissance historique est-elle un idéal, dont, plus progressera notre analyse, plus il apparaîtra qu’il n’est pas facile à atteindre : l’histoire du moins doit être le résultat de l’effort le plus rigoureux, le plus systématique pour s’en rapprocher. C’est pourquoi on pourrait peut-être préciser utilement «la connaissance scientifiquement élaborée du passé», […] c’est-à-dire, par opposition à la connaissance vulgaire de l’expérience quotidienne, une connaissance élaborée en fonction d’une méthode systématique et rigoureuse, celle qui s’est révélée représenter le facteur optimum de vérité.

A. − [L’histoire d’un point de vue collectif]
1. [Le subst. est précédé d’un déterm. et accompagné d’un adj. ou d’un compl. déterminatif]
a) Recherche, connaissance, reconstruction du passé de l’humanité sous son aspect général ou sous des aspects particuliers, selon le lieu, l’époque, le point de vue choisi; ensemble des faits, déroulement de ce passé. Histoire universelle; histoire de l’art. Faria continuait d’instruire Dantès, (…) lui apprenant l’histoire des nations et des grands hommes (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 213).Nous avons, dans notre histoire, subi des défaites plus graves (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 299).
SYNT.

Histoire ecclésiastique, événementielle, générale, intérieure, nationale, officielle, politique, profane, sacrée, secrète; histoire économique et sociale; histoire grecque, romaine; histoire de la Révolution; histoire de l’Église, de l’humanité, du monde, des peuples; histoire du droit, de la littérature, de la philosophie, des religions, des sciences; histoire de l’esprit humain, de la pensée humaine, des idées, des mœurs; la nouvelle histoire.

♦ Histoire ancienne. Histoire couvrant les périodes les plus anciennes que nous connaissions depuis l’apparition de l’écriture et jusqu’à la chute de l’Empire romain (476) (cf. Encyclop. éduc., 1960, p. 229).
♦ Histoire du Moyen Âge. Histoire qui commence en 476 et dont on fixe généralement le terme à la découverte de l’Amérique (1492) (cf. Encyclop. éduc., 1960, p. 229).
♦ Histoire moderne. Histoire couvrant la période 1492-1789 (cf. Encyclop. éduc., 1960, p. 229).
♦ Histoire contemporaine. Histoire qui commence en 1789 et s’étend jusqu’à nos jours (cf. Encyclop. éduc., 1960, p. 229).
♦ Histoire Sainte. Ancien et Nouveau Testament; plus partic., Ancien Testament, relation de l’histoire du peuple hébreu. On m’enseignait l’Histoire Sainte, l’Évangile, le catéchisme sans me donner les moyens de croire (SARTRE, Mots,1964, p. 207).
♦ Histoire des civilisations. Histoire qui s’attache à la vie matérielle, morale, culturelle. Exploitation méthodique des sources non écrites de l’histoire des civilisations (Traité sociol.,1968, p. 292).
b) Expressions
− C’est de l’histoire ancienne, c’est de la vieille histoire. C’est une chose dépassée, il n’en est plus question. Hé! c’est de l’histoire ancienne, mon cher ami, dit Mmede Rênal en riant (STENDHAL, Rouge et Noir,1830, p. 130).
L’histoire ancienne (p. plaisant., à propos d’une femme âgée). MmeLedoux : C’est bon, l’histoire ancienne, tournez-moi le feuillet (DIEULAFOY, FRANCIS, DESAUGIERS, DUPATY, Une Matinée du Pont-Neuf,1806, p. 36 ds QUEM. DDL t. 19).
− La petite histoire. Le côté anecdotique de l’histoire; l’ensemble des faits historiques secondaires. Anton. la grande histoire, l’Histoire (avec un grand H).Un homme qui a un goût de la petite histoire, de l’anecdote, des côtés vraiment amusants de l’humanité (GONCOURT, Journal,1874, p. 1012).
♦ Pour la petite histoire. Signalons, pour la petite histoire, que l’actuel président Kennedy a été employé de cette agence (Agences presse,1962, p. 13).
c) P. méton. Ouvrage relatant des faits du passé. Pauvre Marie! Il lui faut retravailler pour l’examen d’octobre (…); elle lit dans les atlas, dans des Histoires de France (COLETTE, Cl. école,1900, p. 249).
2. [Le subst. est empl. seul]
a) Évolution de l’humanité à travers son passé, son présent, son avenir. Un moment, un tournant de l’histoire; à travers, au cours de l’histoire. Il [Napoléon Ier] faisait l’histoire et il l’écrivait (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 802).Paysages chargés d’histoire (MASSIS, Jugements,1923, p. 135).L’Histoire commence ou recommence par la rencontre d’un homme et d’un événement (F. MITTERRAND, Ici et maintenant, Paris, Le livre de poche, 1981, p. 37).
SYNT. Mouvement, sens de l’histoire; époques, événements de l’histoire; pour la première fois dans l’histoire; tout au long de l’histoire; exemple tiré de l’histoire; unique dans l’histoire; appartenir à l’histoire; (être) sans exemple dans l’histoire; jouer un rôle dans l’histoire; géographie, philosophie de l’histoire.
− En partic.
♦ [L’histoire est personnifiée] Le tribunal de l’histoire; les enseignements, les leçons de l’histoire; l’histoire atteste, montre; (à ce que) dit l’histoire. L’histoire amnistie Henri quatre (HUGO, Chansons rues et bois,1865, p. 50).V. comparer ex. 8.
♦ Partie du passé que l’on connaît par des documents écrits. Au cours des siècles de l’histoire et de la préhistoire (GAULTIER, Bovarysme,1902, p. 188).
− PEINT. Genre consistant à représenter des scènes (de caractère militaire, politique, etc.) passées ou mythologiques. Peintre, peinture d’histoire. Sa galerie était composée de tableaux d’histoire, de tableaux sur des sujets poétiques et religieux, et de paysages (STAËL, Corinne, t. 2, 1807, p. 69).La plupart des prix de Rome renoncent vite à « l’histoire » pour peindre de riches bourgeois en redingote (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914, p. 410).
− [P. allus.]
♦ [au proverbe Les peuples heureux n’ont pas d’histoire, les peuples heureux ne connaissent pas d’événements marquants, dignes de mémoire] :
1. … je m’apprivoisai vite et me plus si bien par la suite, que véritablement comparable aux peuples heureux qui n’ont pas d’histoire, (…) c’est peut-être, oui, la période de toute ma vie dont je me souviens le moins. VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Confess., 1895, p. 54.
♦ [au vers de Voltaire, dans sa pièce Charlot ou la Comtesse de Givri, I, 7 Et voilà justement comme on écrit l’histoire, pour indiquer qu’on déforme la réalité historique] :
2. … privation de la pipe, souffrance horrible à laquelle n’ont pas été condamnés les premiers chrétiens. Et on dira que les empereurs ont été cruels!!! Voilà comme on écrit l’histoire, Môssieu! FLAUB., Corresp.,1844, p. 150.
b) Science qui étudie, relate de façon rigoureuse le passé de l’humanité; discipline scolaire, universitaire correspondante; leur contenu. Cours, leçon, livre d’histoire; apprendre, enseigner l’histoire; faire de l’histoire. En compagnie de M. Martin, le professeur d’histoire et de géographie (DRUON, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 90) :
3. … l’histoire n’est pas seulement une monographie; elle ne s’intéresse pas seulement à un individu, quelque grand qu’il soit; elle cherche particulièrement l’ordre et le progrès des événemens… COUSIN, Hist. philos., t. 1, 1829, p. 139.
3. P. anal.
a) Évolution, passage par différentes phases d’un objet quelconque de connaissance; étude, description correspondante. Données intéressantes sur l’histoire anatomique et physiologique de ce viscère (CUVIER, Anat. comp., t. 4, 1805, p. 65).L’histoire de la Terre est divisée, par les géologues, en plusieurs grandes ères (BOULE, Conf. géol.,1907, p. 54).
b) En partic.
− LINGUISTIQUE
♦ Histoire d’un mot, d’un vocable. La simple histoire d’un vocable à travers les âges (VALERY, Variété III,1936, p. 168).
♦ Histoire d’une langue. Je lis aujourd’hui, dans l’Histoire de la Langue française de Brunot :… (GIDE, Journal,1907, p. 240).À une étape de l’histoire de la langue correspond une étape dans celle de la graphie (SAUSSURE, Ling. gén.,1916, p. 49).
♦ Histoire transformationnelle* d’une phrase.
− Histoire naturelle. Connaissance, étude, description des êtres et des corps qui se trouvent dans la nature. Synon. mod. sciences naturelles.Cabinet, muséum d’histoire naturelle. Aujourd’hui, l’histoire littéraire se fait comme l’histoire naturelle, par des observations et par des collections (SAINTE-BEUVE, Pensées,1852, p. 50).
B. − [L’histoire d’un point de vue individuel]
1. Ensemble d’événements, évolution concernant une personne ou une chose. En 1798, se présente dans l’histoire de mon père une circonstance futile en apparence, importante en réalité (SAND, Hist. vie, t. 1, 1855, p. 187).V. épisode ex.
SYNT. Histoire intime, particulière, scandaleuse; histoire d’un homme, d’une famille; la propre histoire de qqn; (c’est) l’éternelle histoire de.
− Expr. C’est mon histoire que vous contez là; voilà mon histoire (Ac. 1835-1935). Ce n’est pas le plus bel endroit de son histoire, le plus beau de son histoire (Ac. 1835-1935). Savoir l’histoire de quelqu’un (Ac. 1835-1935). C’est l’histoire de tous les (+ une catégorie de personnes).C’est l’histoire de tous les contemplatifs (BREMOND, Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 612).
2. Fam. Ce qui arrive à quelqu’un, ce qui le concerne en particulier; ce qui est fait par quelqu’un.
a) Affaire, aventure, problème particulier. Drôle d’histoire; quelle histoire! En dehors d’une petite histoire de braconnage (G. LEROUX, Parfum,1908, p. 49) :
4. − Qu’est-ce que les gens ont à foutre de ce que je pense, moi, ou de ce que je sens? dit Henri. Mes petites histoires n’intéressent personne; et la grande histoire n’est pas un sujet de roman. BEAUVOIR, Mandarins,1954, p. 225.
SYNT. Curieuse, déplorable, fameuse, sale, vilaine histoire; le fin mot de l’histoire; histoire d’argent, de famille, de femmes.
− Expr. C’est toute une histoire. Ce fut toute une histoire. Il s’était mis cela dans la tête (LEAUTAUD, In memor.,1905, p. 207).C’est toujours la même histoire. Qu’est-ce que vous voulez, c’est toujours la même histoire, la même fatalité imbécile de la vie (COURTELINE, Femmes d’amis, Fils, 1885, p. 114).C’est une autre histoire. Mais ce fut une bien autre histoire, quand il fallut savoir lequel de nous deux mangerait cette pauvre petite fraise (ZOLA, Nouv. contes Ninon,1874, p. 39).Sans histoire. Sans incident. Oui, j’eusse désiré une vie sans histoire (BERNANOS, Joie,1929, p. 669).
b) En partic.
− Affaire compliquée, difficile. C’était une histoire qu’une figure debout. Il fallait des armatures de fer (ZOLA, Œuvre,1886, p. 185).
− Aventure amoureuse. Vous avez été souvent aimé. Vous avez eu des histoires, des aventures (FLERS, CAILLAVET, M. Brotonneau,1923, I, 13, p. 9).
♦ Histoire de cul, de fesses. V. cul I C 1.
− Au plur. Complications, ennuis, méchancetés faites par quelqu’un. Des histoires à n’en plus finir; un tas d’histoires; personne à histoires; pas d’histoires. Il ne veut pas s’attirer des histoires inutilement (MICHAUX, Plume,1930, p. 143).
♦ Loc. Avoir des histoires avec qqn. Tiens! Avale ça, et puis décampe : je ne tiens pas à avoir des histoires avec ton père, moi! (MARTIN DU G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 642).Faire des histoires (de qqc.), (à qqn). Ils ne font pas tant d’histoires quand ils bombardent Rouen (VAILLAND, Drôle de jeu,1945, p. 69).
C. − Récit concernant un fait historique ou ordinaire; narration d’événements fictifs ou non. Histoire d’amour; conter, raconter une histoire. Les histoires de Tacite ne sont autre chose que des mémoires passionnés contre les tyrans (MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 69).Ces deux histoires sont nées jumelles. Qui lit César Birotteau, devra donc lire la Maison Nucingen (BALZAC, C. Birotteau,1837, p. 421) :
5. … Baudelaire (…) n’a pas inséré la traduction de cet essai dans les œuvres mêmes d’Edgar Poe; mais il en a introduit la partie la plus intéressante (…) dans la préface qu’il a placée en tête de sa traduction des Histoires [it. ds le texte] extraordinaires. VALERY, Variété II,1929, p. 147.
SYNT. Histoire fantastique, invraisemblable, touchante, vraie; admirable, belle, bonne, simple, tragique, triste histoire; héros, suite d’une histoire; écouter, inventer, lire une histoire; histoires merveilleuses; histoires de brigands, de fantômes, de fées, de sorcières; aimer les histoires; savoir des histoires.
− Expressions
♦ Histoire à dormir debout*.
♦ Le plus (+ adj.) de l’histoire, (c’est que…).Il ajouta (…) : « Mais le plus drôle de mon histoire, c’est qu’elle est vraie. » (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Voleur, 1882, p. 1229) :
6. LE DUC : Vous perdiez le plus beau de l’histoire (…). LA MARQUISE : Mais c’est une histoire des Mille et une Nuits que vous me racontez là! DUMAS père, Mllede Belle-Isle,1839, IV, 7, p. 67.
− En partic.
♦ Récit, souvent tiré de l’Écriture Sainte, représenté par un dessin, une peinture. Les petites roses des fenêtres se simplifient pour laisser place aux histoires des vitraux (MICHELET, Journal,1831, p. 81).
♦ Histoire (drôle). Récit généralement court visant à faire rire. Histoire belge. V. gascon, VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 238.
♦ Histoire de fou(s)*.
♦ Souvent au plur. Récit faux, mensonge; paroles mensongères, médisantes. Des histoires circulent, courent. Je ne suis déjà que trop victime de vos mauvais propos. Je sais (…) les jolies histoires que vous faites sur mon compte (LECLERCQ, Proverbes dram., MmeSorbet, 1835, 4, p. 137).On t’a raconté des histoires, camarade, ou tu les as rêvées (BERNANOS, Nuit,1928, p. 32).
Loc. fam. Qu’est-ce que c’est que cette histoire? :
7. CLOTAIRE : Marceline s’en va. Marceline te quitte. Marceline part avec un autre. JEF : Qu’est-ce que c’est que cette histoire? Je viens de la rencontrer. Elle riait. ACHARD, J. de la Lune,1929, III, 2, p. 26.
D. − Fam. et pop.

REM. 1.
Histoire-batailles, subst. fém.Histoire envisagée essentiellement sous l’angle des batailles. Les auteurs de manuels d’histoire au temps de l’histoire-batailles (THIBAUDET, Réflex. litt.,1936, p. 60).
2.
Histoire-chronique, subst. fém.Histoire relatée à la manière d’une chronique. Barante (…) chef de l’histoire-chronique (THIBAUDET, Hist. litt. fr.,1936, p. 266).
3.
Histoire-discours, subst. fém.Histoire relatée par des exposés oraux. Guizot (…) véritable chef de l’histoire-discours (THIBAUDET, Hist. litt. fr.,1936, p. 266).
4.
Histoire-drame, subst. fém.Pièce de théâtre dont le sujet concerne un personnage, un fait historique. Le duc d’Enghien, histoire-drame, par M. Édouard d’Anglemont (Musset dsRevue des Deux Mondes,1833, p. 103).
5.
Historisant, -ante, adj.a) Historien historisant. Historien qui considère sa discipline comme obéissant à des lois propres et qui l’étudie dans cette perspective par la seule description des événements et des conditions de leur déroulement. Le véritable historien (…) non (…) l’aride historien historisant (MARROU, Connaiss. hist.,1954, p. 173).b) Histoire historisante. Histoire correspondant à cette conception. L’histoire historisante demande peu. Très peu (L. FEBVRE, Combats pour hist., Hist. historisante, 1947, p. 118).
6.
Historisation, subst. fém.Action de faire l’histoire; résultat de cette action. Cette philosophie [du révolutionnaire] naît d’une entreprise historique et doit représenter à celui qui la réclame un certain mode d’historisation qu’il a choisi (SARTRE, Sit. III,1949, p. 181).
7.
Historisme, subst. masc.Doctrine selon laquelle tout fait, tout événement s’explique par les conditions historiques, résulte de l’évolution historique. Faute d’apercevoir la genèse du monde, la description des types idéaux reste déchirée entre l’historisme et le formalisme (J. VUILLEMIN, Être et trav.,1949, p. 37).
Prononc. et Orth. : [istwa:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. [Début XIIes. istorie « récit des événements de la vie de quelqu’un » (Alexis, Prologue, éd. Chr. Storey)]; ca 1105 storie (BENEDEIT, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 54); 1155 hystoire « chronique, récit des événements relatifs à un peuple ou à l’humanité en général » (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 14809); 2. a) ca 1265 istore « ensemble des connaissances relatives à l’évolution de l’humanité; science » (BRUNO LATIN, Trésor, éd. Fr. J. Carmody, livre 3, chap. 41, §3); b) 1646 histoire « mémoire que la postérité garde du passé » (ROTR., St. Gen., I, 4 ds LITTRE). B. [Ca 1200 d’apr. FEW t. 4, p. 439b]; ca 1240 hystoire « représentation d’une scène à plusieurs personnages; illustrations » (RICHARD DE FOURNIVAL, Bestiaire d’amour en vers, éd. A. Långfors, vers 66, fo90a ds Mémoires de la Société néo-philologique de Helsingfors, t. 7, p. 305). C. 1. a) Ca 1462 histoire « récits d’événements réels ou imaginaires » (Cent nouv. nouv., éd. Fr. P. Sweetser, p. 1); b) 1663 « propos mensongers destinés à tromper ou à mystifier » (MOLIERE, L’Étourdi, 943); 2. 1670 « affaire, événements particuliers » (ID., Bourgeois gentilhomme, III, 3). D. 1551 histoire naturelle (P. BELON, Histoire naturelle des estranges poissons marins [titre]). Empr. au lat.historia « œuvre historique, récit », « objet de récit historique », « contes, sornettes », du gr. ι ̔ σ τ ο ρ ι ́ α « recherche, information », « résultat d’une information, connaissance », « récit » d’où « Histoire ». Fréq. abs. littér. : 23 447. Fréq. rel. littér. : XIXes. : a) 30 353, b) 31 889; XXes. : a) 35 297, b) 35 502. Bbg. LAUNAY (M.). Le Vocab. pol. de J.-J. Rousseau. Genève, Paris, 1977, p. 114