1° LE POÈME 42
Rien ne console tant que d’engendrer.
(Important extrait.)

Rien ne console tant que d’engendrer,
O Source de Vaches, ô Source de la Royauté1,
0 Héritier du Tambour, fils de la Tendresse,
Dieu favorise le Sacrifié pour la Dynastie.
Rien ne console tant que de payer une dot
Qui te procure un fils
Devant avoir à cœur la Dynastie et pour elle se sacrifiera !
Rien n’est aussi savoureux que la Royauté,
0 Libérateurs, fils du Souverain, descendant de Rumeza :
En ceux qui versent leur sang en sa faveur, le règne se perpétue.
Il en fut toujours ainsi du Karinga :
En ce qui concerne ses défenseurs, il ne se réjouit que de leurs larmes,
Et n’est possédé que par celui qui renonce à s’épargner,
O le Très heureux, fils du Victorieux, souche du Triomphateur :
Tout homme, par sa progéniture, doit se racheter2 !
Je ne désire pas de le posséder, qu’il soit plutôt mon maître :
Je ne saurais supporter une vieillesse sans appui !
C’est pour cela qu’il partage la félicité avec les Rois :
Leur caractère est commun.
O toi Récolteur, rejeton du Consolateur,
Ceux qui le possèdent en éprouvent bien des soucis !
Vis en paix, Peuple du Rwanda, tu as qui se sacrifie pour toi :
Tu es le sujet d’un Tambour tutélaire,
Qui détermine le Roi à se livrer pour le pays et l’en remercie.
Ce n’est pas à l’aveugle que se lègue le Tambour Souverain :
Il a son Héritier qu’il reconnaît :
Ce Tambour originaire de Karango ne peut être un bien commun !
D’avance excuses pour mes biens et pour mon habitation,
Car je vais exprimer toute ma pensée :
Que soient toujours mes maîtres ceux qui versent leur sang !
Qu’ils soient mes maîtres, du moment que je ne me livre pas :
Lorsque je contemple les bovidés,
Je me rends compte que je tiendrais fort à la vie :
Eh bien Refuge, Roi dont je partage les desseins !
0 Héros qui te rendis au-delà de la frontière,
Tandis qu’en-deçà glaciale avait été la nuit !
O Bouclier, tu mets au large les bovidés !
Par vaincre le plus difficile, tu as débuté !
Voici la Foudre, descendance du Redoutable,
Qui a bouleversé les frontières
Lorsque, du Roi Ntare, elle incendia l’habitation !
Vaincs et triomphe, ô Maître des Tambours que voici :
Pour ta Dynastie, sans trêve, tu as lutté, Et l’as dix fois vengé :
Tu l’as longtemps orné de cent trophées !
Tu as fait défiler les bovidés sur des eaux profondes
Que, en terre ferme, tu avais changées !
Tu en fis un continent, ô Ralliement, en nous l’appropriant !
Tu ne voulus pas que fût surpassée ta renommée Et notre prestige en acquit la suprématie…

1. Tout « Libérateur » est suppôt du Roi : son sang versé est un sang royal, devenu tel grâce à la consécration dont le Libérateur est l’objet par le fait même de sa désignation. Ici l’Aède fait allusion au sang du prince Gihana, versé à la place de celui de Cyilima II. Au vers suivant, le pronom personnel remplace le Karinga ; cette « vieillesse sans appui » est une louange délicate adressée au Roi, qui n’a pas épargné, lui, « le bâton de sa vieillesse ».

2. Karango : les Dépositaires du Code Ésotérique m’ont dit que c’est une localité soit du Buha (l’Uha des swahilisants), soit du Bugufi, pays d’origine de plusieurs Reines Mères, appartenant aux clans des Baha et des Bakono. Aux vers qui suivent, l’Aède veut exalter les représentants de la Lignée, en étalant son horreur du sacrifice suprême qu’ils acceptent, eux, comme tout naturellement.