L’expédition du Bushubi. Celle de ka-Kidogoro. La peste bovine appelée Mulyamo. La petite vérole= Ubushita.

 

                    L’expédition du Bushuhi.

 

  1. Kibogora, Roi du Bushubi , était mort, léguant sa dignité à son fils Nsoro. Le prince Rwabigimba, frère de Nsoro, engagea une guerre de compétition au trône. Comme Nsoro ne pouvait prévaloir, il envoya une délégation au Rwanda pour solliciter l’assistance de Kigeli IV Rwabugili. Le Roi accéda à cette requête et désigna Seruzamba, fils de Ikinani (no 393) comme commandant en chef de l’expédition. Y prenaient part des contingents prélevés sur les Armées Abarasa, Ndushabandi, Inyange, Uruyange et Nyaruguru.

 

Arrivés dans le Bushubi, les Rwandais engagèrent la lutte contre les Urwarama, guerriers de Rwabigimba. Celui-ci fut battu et il se réfugia dans le Bugufi, au Burundi à cette époque. Après avoir remporté la victoire, les Rwandais furent reçus solen-nellement par Nsoro sur les hauteurs de Keza, où il avait fait étendre une grande quantité de nattes pour que ses hôtes ne fussent pas obligés de s’assesoir sur l’herbe. Il offrit une grande quantité de pagnes en cadeaux de remerciement aux Chefs et en envoya encore davantage à Kigeli IV.

 

  1. Rwabigimba comprit qu’avec l’assistance de Rwabugili son adversaire devenait invincible. Il tenta de traiter lui aussi avec le Roi, dans le but d’obtenir sa neutralité. Il envoya à cette fin une délégation de 8 notables, qui arrivèrent avec une grande quantïté de cadeaux à Sakara. Mais le Roi les fit tous arrêter et exécuter, signifiant par là qu’il avait choisi Nsoro. — Apprenant ensuite que le monarque avait quitté le Gisaka, Rwabigimba rouvrit les hostilités contre Nsoro. Celui-ci fit de nouveau appel à son protecteur, qui chargea le Chef Kabaka d’organiser une autre expédition. Celle-ci se rendit au Bushubi, défit Rwabigimba et resta de longs mois dans le pays. Mais le malheur voulait que les Rwandais ne pouvaient boire du cidre de ce pays étranger, ni du lait de la vache ingweba = zebu, qui était tabou au même titre que celui de la chèvre. Les membres de l’expédition souffrirent des privations, à la suite desquelles se déclara une épidémie. Pour pouvoir rentrer au pays, les guerriers supplièrent le Chef Kabalca de transmettre au Roi l’information que Nsoro les avait empoisonnés et envoûtés, au point qu’ils passaient les nuits à cultiver les champs à l’état de somnambules. Le Roi irrité donna à Kabaka l’ordre d’arrêter Nsoro et de le lui amener. Au moment de cette arrestation, les Rwandais massacrèrent Gahene, fils de Bihomora, (no 457) et Muhozi, grand-frère de ce dernier et toute la domesticité de Nsoro. Celui-ci fut arrêté avec son frère Buyombo, ses fils Mukogoto et un autre non nommé dans le récit, sa fille Kambibi, ainsi que ses deux femmes Bihogo et Mukananika, et la Reine mère appelée Mukuru= la Vénérable. Les prisonniers furent gardés dans le Gihunya, tandis que Rubanguka, fils du Chef Kabaka, se rendait au Kinyaga pour annoncer la nouvelle au Roi. Celui-ci les fit venir au Kinyaga. On faisait croire à Nsoro que Kigelf IV allait le faire régner sur le Gisaka, pour se dispenser de faire stationner les armées au Bushubi à le protéger. Une fois les prisonniers arrivés à Ruganda, ils furent exécutés.

 

  1. Après s’être rendu coupable de cette horreur, le Roi s’en alla à sa résidence de ku-Nzinzi, au Bunyabungo. Il y tomba aussitôt gravement malade ; il souffrait d’une fièvre si brûlante qu’on le déposait toute la journée dans un bac en bois rempli d’eau. Même remis de cette maladie, il perdit l’épiderme sur toute la surface de son corps. C’est pour le féliciter d’avoir triomphé de cette grave maladie que l’Aède Munyanganzo, fils de Barembe, lui dédia le poème : no 144 : Umunsi mbalirwa inkuru = Le jour où me parvint la nouvelle. Il lui présentait, en même temps que les siennes, les félicitations de toutes les Familles du Rwanda ayant donné des Reines mères et des Libérateurs à la Dynastie. La maladie du Roi fut attribuée à la colère de Nsoro qui avait été traîtreusement tué. Il fallait l’apaiser, et les oracles divinatoires désignèrent le Chef Kabaka comme le responsable dont l’exécution apaiserait l’esprit de Nsoro assoiffé de vendetta.

 

  1. Ledit Chef était du reste en disgrâce déjà, à la suite d’une parole qu’il avait dite au Roi. Comme il était Chef de la frontière par où s’introduisaient les produits d’Europe ou d’Asie, pagnes, per-les, etc., et que pour les acquérir le Roi faisait passer par ce Chef du morfil, seul article de troc, Kabaka lui avait dit :« Ces marchan-dises viennent des Européens Abazungu. En continuant à leur envoyer une aussi grande quantité de morfil, ils comprendront que le Rwanda est très riche et penseront peut-être venir en piller. Or j’ai appris qu’ils sont tellement forts, qu’aucun Roi n’a pu les vaincre » ! « Quelle aberration ! Oser affirmer qu’il y ait une catégorie d’étrangers capables de vaincre le Roi du Rwanda ! Kabaka est un félon » ! — Ainsi en concluaient ses ennemis, ja-loux de Je voir si longtemps l’intermédiaire du Roi en ces opérations de troc dont il profitait lui-même largement.

Ainsi, en provoquant la mort de Nsoro, Kabaka s’était-il lui-même préparé le coup de grâce. Bientôt convalescent, le Roi transféra au Gisaka les restes de Nsoro et fit exécuter Kabaka. Il renvoya ensuite au Bushubi ces restes, pour y être ensevelies, en même temps que le cadavre de Kabaka.

 

  • L’Expédition de ku-Kidogoro ; Mulyamo et Ubushita.

 

  1. A l’époque où nous sommes arrivés, soit en 1891-182, le Roi du Bunyabungo, Byaterana fils de Makombe, vient de mourrir. Ce pays a intronisé un jeune enfant appelé Rutaganda ; le pays est gouverné par la Reine mère Mugeni Gahwijima. Kigeli IV dispose d’une tête de pont fermement tenue, à savoir l’Itambi, région Nord du Bunyabungo, gouverné par Nkiko-Baramba, fils de Bigomokero (celui-ci fils de Makombe et frère de Byaterana). C’est dans l’Itambi que se trouve la résidence royale de ku-Nzinzi. Le Chef de l’Itambi a gagné à la même cause son voisin immédiat, Ruhangara fils de Byaterana. Kigeli IV va attaquer le pays sans désem-parer, à partir de ces deux provinces qui ont reconnu son autorité. Il entend profiter d’une grande famine dont le Bunyabungo souffre en ce moment. Il a mobilisé un grand nombre d’armées. L’île Ijwi, désormais divisée en deux provinces, sous l’administration de Chefs Rwandais, lui fournit un contingent de grande valeur : la Compagnie Inkera-mihigo (no 406) sous le commandement de Mbwana, fils de Bidaga, et Ibidakurwa = les Irnbousculables, sous le commandement de Kamaka fils de Gasindildra. Un Chef émigré du Burundi, le nommé Mugenzi, que le Roi a récemment installé au Sud du Kinyaga, lui amène une Compagnie également de grande valeur, les Ibigaza = les Egaliseurs. Quant aux armées traditionnelles du Rwanda, la liste serait trop longue.

 

  1. Le commandant en chef en était le prince Karara, fils du Roi. Toutes les flottilles au rendez-vous embarquèrent les armées pour les déposer dans l’île Ibinja, puis de là, les débarquèrent sur la terre ferme à Bweramvura, dans le territoire du Chef Ruhangara. Celui-ci est désigné par le Roi pour commander la Garde royale, les Ingungura-rugo dans l’opération initiale de l’expédition. A cette opération prennent part également les armées Uruyange, et Abashakanba ; ainsi que les deux Compagnies de l’île Ijwi Inkera-mihigo et lbidakurwa. Les guerriers personnels de Ruhangara, bien entendu, escortaient le Chef. Cette ouverture des hostilités était dirigée contre le prince Kabi, fils de Makombe, oncle de Ruhangara. Kabi habitait à Kidogoro, localité qui a donné son nom à l’expédition. Mais Kabi s’était éclipsé : il n’y eut pas de grande bataille ; seuls les guerriers de Ruhangara rencontrèrent une colonne qu’ils mirent en déroute après un bref engagement. Les armées revinrent camper chez Ruhangara même, d’où ils envoyèrent des messagers pour informer le Roi. Il leur renvoya les messagers, pour les informer qu’ils devront le rencontrer le lendemain dans la lo calité appelée mu-Gishoki.

 

  1. Une fois au Gishoki, le Roi donna aux Chefs Kabare et Rutishereka l’ordre d’aller établir un camp à Kidogoro même. Kabare venait d’être nommé à la tête de l’armée Uruyange, tandis que Rutishereka commandait l’armée Abashakamba : ayant été le lieutenant du prince Rutarindwa dans le commandement de cette milice, il en resta le Chef .titulaire après l’intronisation de son supérieur .

Chacune des deux Milices n’était représentée en cette expédition que par deux Compagnies. Le Roi leur adjoignit l’armée Nyaruguru du prince Muhigirwa, commandée alors par Rwabatambika, fils de Ndamutsa ; l’armée Impama-kwica= les Massacreurs-attirés, du Chef Mbanzabigwi, infirme, représenté alors dans le commandement par Rugenera, fils de Migogo ; l’armée Intaganzwa, du Chef Nturo, fils encore mineur et successeur de Nyilimigabo, représenté dans le commandement par son grand-frère Bihutu ; les Ibigaza du Chef Mugenzi, ainsi que les Abashoza-mihigo= les Provocateurs-de-hauts-faits, du prince Nshozamihigo, fils de Kigeli IV, dont le commandant était Rukaburacumu fils de Bitebuka. Enfin les Inkera-mihigo et lbidakurwa de Ile ljwi.

 

  1. Le prince Kabi ne s’était pas retiré simplement pour esquiver les combats : il était allé rejoindre d’autres Chefs du Bunyabungo, afin de revenir avec eux en force. Il se trouvait avec les Chefs Rwa-bilca, Npfizi, Kirusha fils de Migamba, Mukungu fils de Gitoyi, a quelques autres. Ces Chefs vinient un jour, escortant la Reine mère Mugeni-Gahwijima, pour observer d’une hauteur voisine le camp des Rwandais. La Reine mère avait conclu : « Comment ces Rwandais, occupant un lopin de terre si réduit, peuvent-ils passer un jour de plus en mon pays ? Attaquez-les et faites place nette sans plus tarder ».

 

La première attaque contre le camp se fit de jour ; les assaillants arrivaient en trois colonnes principales, débouchant de mu-Bu-shunguti, de mu-Rwamira près Karehe, et de Henanzovu. Les Rwandais firent répartis en conséquence et attendirent l’attaque. Les Banyabungo de deux colonnes engagèrent une bataille acharnée, mais ils furent battus. Le Chef Mukungu fils de Gitoyi fut tué par Semusambi, fils de Kamuhanda. La colonne qui avait débouché de mu-Bushunguti se trouvait en face de l’armée Uruyange. Ayant constaté que les deux autres colonnes étaient battues, elle se retira sans engager le combat.

 

  1. Ayant échoué de jour, les Banyabungo décidèrent d’attaquer la nuit. Une colonne chargée de tromper le camp, vint de la localité appelée ku-lkongi; en poussant les clameurs guerrières, clans le but d’attirer les Rwandais de ce côté. Deux autres colonnes qui chemi-naient en silence a qui étaient destinées à effectuer l’attaque prin-cipale, vinrent des localités Mwendo et Gituli. Les Ch.efs Rwandais délibérèrent et conclurent en disant : « Que le gros des guerriers, dans le silence le plus complet, se poste autour du camp du côté où règne le silence, car ce sera de Ià que viendront les véritables assaillants. Quant à ceux qui poussent les cla.meurs, il est possible qu’ils n’approcheront même pas du camp ; mais pour parer à toute éventualité, on plaça l’armée Abashakamba de ce côté-là.

 

L’attaque se produisit comme les Chefs l’avaient supposé : ceux qui s’avançaient en silence pour surprendre furent surpris. L’obscurité etait complète, les traits étant lancés au hasard. Les assail-lants reculèrent en désordre, ce qui augmentait leur vulnérabilité. Ce fut au lever du jour qu’on put dénombrer les morts. Les Rwandais n’eurent qu’un seul blessé, Semulima fils de Kigundu. Comme la lance lui avait été figée dans l’omoplate, il parut évident que, dans l’obscutité, un Rwandais qui ven.ait de derrière lui l’avait pris pour un des assaillants qui se retirait.

 

  1. La dernière bataille, qui devait avoir de l’envergure, fut annoncée d’une manière inhabituelle. Ce fut la seule fois connue où les assaillants annonçaient eux-mêmes leur attaque et le jour où elle serait déclenchée. Deux Compagnies, l’une des Uruyange et l’autres des Abashakamba, avaient été détachées pour protéger les vaches du camp menées pâturer vers la localité ku-Mbiza, au-delà de mu-Bushunguti. Il se présenta un groupe de Banyabungo, dont I’un se détacha et héla les Rwandais. Il désirait que quelqu’un s’avançat pour entendre un message destiné au camp. On envoya le nommé Ndaruhutse fils de Mutsinzi, de l’armée Uruyange. Le messager demanda à ce dernier son nom. — « Je m’appelle N daruhutse » (c.à.d. Maintenant je goûte le repos). — « Quel nom menteur, commenta l’autre ; votre Roi vous amène ici, d’ici au Ndorwa, du Ndorwa encore ici !… et vous prétendez être Ndaruhutse ?» Il ajouta : Ecoutez-moi bien : comptez trois jours, et le 4ème sera un dimanche. Une fois le dimanche écoulé, nous vous attaquerons le lendemain. Que personne ne s’absente donc ce jour-là !

 

Le propos fut rapporté aux Chefs, mais personne ne prit l’information au sérieux « A-t-on jamais vu quelqu’un qui, dans l’intention d’attaquer, joue le rôle des espions contre lui-même ? » On s’en moqua si bien que, le jour prévu pour l’attaque, les Chefs Kabare, Rwatangabo et Kamaka s’en allèrent du camp, escortés de nombreux guerriers, pour se rendre à Bweramvura faire leur cour au Roi. Ils ne le trouvèrent du reste pas là, car il avait entrepris un voyage éclair vers sa résidence de Ruganda au Kinyaga, où il se trouvait légèrement souffrant.

 

  1. Au jour dit, les guerriers du Bunyabungo qui s’étaient donné ren-dez-vous arrivèrent en masses incalculables, noircissant de monde toutes les collines au-delà du camp. Le Chef Rutishereka dirigea habilement la bataille, car il était renommé en la matière. On ne peut ici entrer dans le détail en narrant toutes les perpéties des combats qui durèrent toute la journée. Nous nous arrêterons davantage sur la tactique des Banyabungo sur le champ de bataille, information qui n’a pas été relevée dans les paragraphes précédents.

 

Nous savons que les Rwandais formaient une seule ligne de bataille, dont les deux ailes s’appelaient impembe (au singulier : uruhembe — grosse corne) et le centre umukondo = le nombril. Les Banyabungo formaient au contraire plusieurs lignes, les unes derrière les autres ; chaque ligne s’appelait umubibi = délimitation. On pouvait avoir  ainsi de 3 à 6 lignes. La première engageait le combat ; dès qu’elle était soit fatiguée, soit repoussée, la suivante s’avançait aussitôt et la remplaçait automatiquement. En ce cas celle qui avait quitté la bataille allait se reformer derrière les autres pour se reposer, en attendant que revint son tour de se trouver en première.

 

  1. Ceux qui attaquaient le camp ce jour-là étaient formés, sur un point précisé, en 3 imibibi, tandis que leurs réserves s’étalaient encore sur les collines environnantes, au-delà du cours d’eau appelé Mhu-ngwe. Les Inkera-mihigo de l’île Ijwi, qui prenaient part à la batail-le aux côtés des Indinda II= les Résistants-au-choc (celle de mon informateur Sebaganji) de l’armée Uruyange, dirent aux Rwandais; « Laissez-nous la première ligne et vous qui savez mieux tirer à l’arc, visez surtout les deux lignes suivantes, pour qu’elles soient pertur-bées ». De fait, la première ligne une fois refoulée, la ligne suivante avait été maltraitée et la panique se produisit parmi les assaillants.

 

Ces derniers furent finalement battus autour du camp et refoulés au-delà du Mpungwe. Se voyant finalement battus en principe, toutes les foules des Banyabungo se dispersèrent et la victoire du jour resta aux Rwandais, qui avaient eu plusieurs morts et un nombre très élevé de blessés.

 

Apprenant ce qui s’était passé en son absence, le Chef Kabare devnt inconsolable, affirmant que si le camp avait été vaincu, il se serait suicidé. Le Roi apprit bien vite la victoire et revint précipitamment à Bweramvura. Il envoya au camp pour féliciter en son nom les armées victorieuses, le nommé Karega fils de Kaligata, porté en hamac et habillé comme le monarque. (Il était un héros aux 21 tués expirés sur le champ de bataille et il avait été honoré du cérémonial dit Crémation du javelot, apothéose des honneurs m-litaires de l’ancien Rwanda).

 

  1. Le Bunyabungo était alors découragé. Le Roi décida de terroriser le pays pour l’acculer à la soumission complète. Il ordonna que les guerriers du camp de ku-Kidogoro resteraient avec lui, et il envoya les Ingangura-rugo attaquer la localité ku-Bukali chez le Chef Mpfizi dans la direction Sud vers le Kanywilili et la localité appelée ku-Mwogo capitale du pays, résidence de Rutaganda.

L’incursion n’eut pas de combat à livrer, car les gens se sau-vaient à l’approche des Rwandais. Les Ingangura-rugo revinrent et trouvèrent le Roi installé à ku-Bukali. Ils furent attaqués de nuit dans le camp, mais les assaillants furent vaincus, laissant plusi-eurs morts sur le terrain.

 

Le Roi envoya ensuite une expédition contre le marais de papyrus appelé mu-Nyakamira, et contre la localité appelée ku-Buzigira chez 1e Chef Muzuka. C’était partout la même démoralisation : les gens fuyaient devant les Rwandais. Le même genre d’incursion fut lancée contre le fameux marais du Kanywilili ; ici ce fut un échec devant le Chef Kiraba qui s’y était retranché et en avait fait un refuge inexpugnable. Les Rwandais y eurent plusieurs morts, dont le nommé Rugeyo fils de Kagabo d’entre les Ingangura-rugo. Voyant qu’il n’y avait plus moyen de résister efficacement contre les envahisseurs, les Chefs du Bunyabungo se décidèrent à faire leur soumission dont Mpfizi, Gituza et d’autres. Seul Kiraba s’y refusa, sachant que, ayant tué Nyilimigabo et Nyamushanja, il serait immédiatement exécuté.

 

  1. Ce fut à cette époque que Munigankiko, fils de Buki (no 445), responsable de la résidence royale de Mabungo, au Bufumbira, fit une expédition contre une région du Ndorwa appelée Bushengero. Il razzia quelques centaines de vaches, sans se douter que la zone était infestée de la peste bovine qui porterait le nom de Mulyamo = le Faucheur. Voulant faire valoir ses exploits, il alla du Bufiambi-ra au Kinyaga pour faire défiler son butin devant le monarque à Ruganda. Mais partout, sur son parcours, il semait la peste bovine, et alla en installer le foyer à Ruganda. De cette manière le Mulyamo envahit le Rwanda, non seulement par sa voie normale du Nord-Est, mais aussi par les régions de l’Ouest. Munigankiko fut disgracié et relégué dans le Kabagali, sa région d’origine, où devait bientôt le suivre le bourreau chargé de mettre fin à ses jours, en punition de la peste qu’il avait véhiculée à travers le pays. La petite vérole = ubushita suivit de près la peste bovine et ravagea le pays. Les deux fléaux frappèrent le Rwanda en 1893.