Les biens.

  1. Propriété en général.

Les Banyaruanda ont une notion de la propriété moins abstraite que la nôtre. Elle est comparable à celle de la possession.

D’autre part, la différenciation n’est pas faite entre les choses mobilières et immobilières. Mais les biens portent des noms différents selon leur nature ou leur usage : Les Banyarwanda distinguent les amatungo (animaux); les ibintu, nom générique qui s’applique au rugo, aux imirima (champs), ubwatsi (pâturages), imyaka (récoltes) et urutoke (bananeraies); les ibiti (arbres); les intwaro (armes et instruments tranchants); les ibikoresho(houes, pioches, paniers, barattes); les imyambaro (vêtements).

  1. Propriété foncière.

Une véritable propriété foncière existe au Ruanda, alors que, au Congo belge, les indigènes considèrent que la nue propriété du sol appartient aux mânes et s’en réservent uniquement l’usufruit.

Toutes les terres du pays appartiennent au Mwami, qui en abandonne la jouissance par voie de cascade aux différents chefs ou sous-chefs. Ceux-ci à leur tour cèdent un isambu (terrain vendu) ou concèdent un umwatano (terrain loué) aux Bahutu moyennant un prix ou une redevance consistant en un certain pourcentage sur les récoltes à venir (icyata murima : litt. : cadeau pour avoir un champ).

Le Muhutu détient son terrain de façon plus ou moins précaire. En effet, même s’il paie régulièrement les redevances, il se peut que sa terre lui soit reprise un jour, par exemple s’il néglige de s’acquitter des prestations coutumières dues aux chefs et au Roi; dans ce cas, il peut être dépouillé en tout ou en partie de son terrain, mais la dernière récolte ne lui est pas enlevée (Un régime de propriété sensiblement différent existe dans la partie ouest du Bunyambiriri, l’extrême nord du Ndiza et le Rukiga (provinces Mulera et du Bugoyi), où les terrains défrichés et cultivés par les Bahutu sont l’objet d’un droit de propriété familiale. Ce droit est sacré et les Batutsi, dont le pouvoir dans ces régions est plutôt nominal, savent qu’ils ne pourraient le entrer sans s’exposer à de graves mécomptes, voire à des représailles sanglantes).

Le chef de colline a également le droit d’enlever une parcelle de terrain (ubugerure) à des Bahutu pour en former un ubuka qu’il veut offrir à quelqu’un d’autre ou le garder comme propriété personnelle (imirima y’inyarurembo). Le morceau de parcelle qui reste au Muhutu s’appelle isagu.

Le Muhutu peut transmettre son droit d’exploitation à son fils par voie d’héritage. Un terrain qui passe d’une génération à l’autre s’appelle indeka.

Des terrains sont parfois détenus collectivement par une famille en la personne de son chef (isambu ou ingobyi y’iwabo). Les membres de la famille ne lui paient pas de location et, à l’exclusion des étrangers, ont le droit d’y couper du bois de chauffage ainsi que d’y mener paître le bétail. Il existe aussi des bois communaux (icyanya). Le chef de colline s’en réserve une partie et permet l’exploitation du reste aux gens de la colline.

Les Batwa prétendent être les occupants légitimes des forêts. Pour cette raison, ils entrent souvent en conflit avec les Bahutu voisins des régions boisées. Les minières et les carrières de terre plastique sont la propriété du chef. Niais celui-ci permet à ses gens de s’y approvisionner en échange d’une redevance (une houe ou des pots).

Les limites (imbibi) des champs sont constituées en général par de petits fossés (impavu) ou des tas de pierres (ibishyinga). Il n’y a pas de zones neutres entre les terres.

Un inkungu est un terrain délaissé par suite du départ volontaire ou de la mort sans héritier de son détenteur. Un homme qui est l’objet de la malédiction paternelle ou qui est chassé par le chef, par exemple à la suite de vols répétés de bétail, doit aussi abandonner sa parcelle. Le chef peut offrir un inkungu (ou un ubugerure) à un étranger à la colline qui demande à s’y établir. Si celui-ci est un Muhutu, il est obligé de se soumettre aux mêmes obligations que son prédécesseur. Si c’est un Mututsi, il n’est tenu de payer aucune redevance foncière et le chef lui donne même en plus un pàturage.

Les droits de passage et d’accès ne sont pas privatifs. Les gens de la colline peuvent circuler librement sur les terres des uns et des autres. Il en est de même pour le bétail, pour lequel des chemins spéciaux sont aménagés. En cas de contestation en matière foncière, le litige est porté devant le chef de colline, qui se rend sur les lieux et, après avoir entendu les témoins, départage les plaideurs.

  1. Coutumes de chasse.

Les coutumes de chasse sont très nombreuses. Àussi ne citerons-nous que quelques cas parmi les plus fréquents : L’indigène chassant isolément qui a tué une antilope ordinaire (impongo) prend la viande et la dépouille. La chasse en battue est organisée par le chef, qui détermine les terres à battre, après avoir pris l’avis des chasseurs réputés batutsi ou bahutu et suivant les indications des pisteurs. Le chef désigne aussi les traqueurs, choisis parmi les plus mauvais tireurs; pour stimuler leur zèle dans cette tâche ingrate, il leur promet des pots de bière, si la chasse est fructueuse.

Les indigènes sont tenus de prendre part à la chasse, mais ils se plient de bon gré à cette obligation qui est pour eux un divertissement apprécié et également une source de profits.

De même, celui qui au cours d’une battue a blessé le premier une bête est censé l’avoir tuée. Il a droit à la peau et à une cuisse. La viande est partagée entre tous les chasseurs batutsi ou bahutu. Le chasseur qui abat plusieurs antilopes peut conserver la peau d’une bête.

Celui qui trouve une bête tuée doit la rendre aux chasseurs. Théoriquement du moins, le gibier appartient au Roi et les dépouilles d’une certaine valeur(Les peaux d’antilope de marais sont très appréciées des Batutsi, à cause de leurs poils longs et soyeux; ils en font des couvertures de lit. Les peaux de bush bock » et  de léopard servent d’ornements de danse aux pages intore) doivent lui être remises, notamment les peaux de loutre (inzibyi ou igihura), d’antilope de marais (impala), de bush bock (inzobe), de lion et de léopard ainsi que les pointes d’ivoire. Si un fauve a été abattu, sa dépouille doit être remise au chef, qui en échange donne aux chasseurs une vache stérile comme ingororano.

Quand le chef de colline chasse avec ses gens, il conserve quelques peaux et donne les autres au chef de province. Celui-ci à son tour en garde quelques-unes et, s’il le juge avantageux pour lui, envoie les autres au  Mwami. Si le chef de colline a tué un lion ou un léopard, la dépouille doit èlre remise au Mwami. S’il y a deux peaux, elles sont partagées entre le Roi et le chef de province. Le chef de colline ne peut donc conserver une peau de léopard que si la chasse a été particulièrement fructueuse. L’indigène qui a abattu trois éléphants a cependant droit pour lui seul aux défenses de la troisième bête tuée.

Enfin, il est interdit à un chasseur de prendre une partie quelconque du crocodile qu’il a tué. L’animal, les pattes alourdies de grosses pierres, doit être précipité au fond de la rivière. Les Banyarwanda croient en effet que le corps du saurien contient un violent poison et ils veulent empêcher qu’il en soit fait usage.

Lorsqu’une bête est signalée, les traqueurs qui se sont avancés dans les fourrés, où ils sont quasi invisibles, et les chasseurs qui les y ont suivis doivent signaler leur présence à leurs voisins par un sifflement discret. Les accidents de chasse sont réglementés par la coutume•

  1. Propriété du gros bétail 

Le Mwami est propriétaire de tout le bétail du Ruanda ou tout au moins des femelles reproductrices. Les grands chefs (abatware) sont chargés par le Roi de veiller sur son bétail dans les différentes provinces. Aussi, la vente de génisses ne peut-elle avoir lieu sans leur autorisation. Au contraire, le détenteur de vaches stériles ou de taureaux peut céder ces bêtes ou les abattre comme il l’entend.

Dans une province, l’indigène acquéreur d’une vache reproductrice ne possède qu’un droit d’usufruit et n’aurait aucune réclamation à faire valoir si le Mwami lui enlevait la bête qu’il a achetée et son croît. L’umutware w’umukenke peut s’opposer à ce que des tètes de bétail sortent de la province. Tout indigène qui va s’établir dans une autre province doit abandonner son bétail, à moins d’avoir reçu l’autorisation du chef de l’emmener avec lui. Quand un indigène quitte sa province, en y laissant son bétail, pour aller s’installer dans une autre, son nouveau chef lui remet généralement un troupeau de la même importance que celui qu’il a perdu. S’il s’échappe de sa circonscription en emmenant subrepticement son bétail, son ancien chef réclame le troupeau. Jadis, si ce dernier se heurtait à un refus, il cherchait à s’emparer d’un troupeau d’une égale valeur appartenant au nouveau chef du transfuge et un conflit armé résultait immanquablement d’un tel différend. Aujourd’hui, le litige est soumis obligatoirement au Mwami. Il ordonne éventuellement que le nouveau chef restitue le bétail et, en cas de mauvaise volonté de sa part, il peul lui enlever en outre un ou plusieurs troupeaux. Avant l’occupation européenne, un chef mécontent d’un de ses gens pouvait lui prendre son bétail en tout ou en partie sans l’autorisation préalable du Mwami. Le chef était sur ce point le «Mwami de son umugaragu ».

Les vachers (abashumba) au service de détenteurs de bétail sont autorisés à prélever une partie du lait des bêtes confiées à leur garde. Ils peuvent être révoqués en cas de négligence.

Classification du bétail d’après                    Classification du bétail

la couleur                                                           d’après l’âge

 

 

Amanya: gris-bleu.                                        1. BÉTAIL MALE :

Ibihogo : brun foncé.                                     mutavu : nouveau-né.

Ibihogo bitose : brun plus foncé.                   Ingimbuke : de quinze jours

Igaju : brun clair.                                           Umushishe : d’un mois

Igaju ry’intukura: jaune-brun.                        lnsharwatsi : qui mange de

l’herbe pour la première fois

Igisa : café au lait.

Igitare : blanc.                                               Umukulira:qui va au pâtu-rage pour

la première fois.

Ikibamba : noir avec de grandes taches blanches. Inshuke : sevré

lkibayi :gris-brun.                                           lkimasa cy’ umukangara : un peu plus

grand que l’inshuke.

lkijugu : gris clair.                                          Karasigainki ibyondo: bon pour payer

une amende.

Isine : noir avec de petites taches brunes.     Igitobyi : prêt à saillir.

Icyasha : avec une tache blanche sur le front.

Ubugondo bw’izagiriza : blanc avec de petites

taches brunes.

Umukara : noir.                                             Imfizi umutore : qui a sailli une fois

Umusengo : brun avec de petites                  Ubukombe : taureau adulte

taches blanches.

Urwirungu rwumugoroba :blanc et noir.      Umutaza : vieux taureau

Urwirungu rw’amarwa : beige rosé.

  1. ) Classification du bétail d’après l’âge.
  2. BÉTAIL FEMELLE :

(Jusqu’au sevrage, même nom que le bétail mâle.)

Ishashi ikata : génisse pleine.

Iliza : premier veau.

lmpete : deuxième veau.

Impeture : troisième veau.

Ijigija : quatrième veau.

Ibuguma : vache qui vêle encore mais dont le produit trop faible meurt.

Inshura : vieille vache qui ne vêle plus.

lsave : vache stérile de naissance (maigre).

Urubereri : vache stérile de naissance (grasse).

 Classification du bétail d’après les cornes.

lgaritse : aux grandes cornes fort étendues.

Impotore : aux cornes dont les pointes sont légèrement tordues.

Ingarure : aux cornes tordues dont les pointes sont dirigées en avant.

Inkungu : sans cornes.

lntenderi: aux cornes dont les pointes sont dirigées vers le sol.

Inkungu y’indegeri : aux petites cornes mobiles.

Ikubise ihembe : avec une corne verticale, l’autre horizontale.

Itegeye inyuma : aux cornes dont les pointes sont dirigées en arrière.

Iteze akamoso : aux cornes entrecroisées.

Urubindo : aux cornes dont les pointes sont dirigées vers les oreilles.

Itegeye ijuru : aux grandes cornes presque verticales.

 Classification du bétail d’après le droit coutumier.

IMBATA.

Tête de bétail reçue en dot, en cadeau ou achetée au marché et dont le possesseur est vraiment propriétaire. Mais si, en se mettant sous le patronat du chef de colline ou du chef de province, il reçoit de l’un de ceux-ci une ou plusieurs vaches appelées inkazibiti ou ingabane, selon qu’il est Muhut ou Mututsi toutes les vaches imbata peuvent, en cas de déchéance de sa qualilé, lui être enlevées avec les autres par une décision arbitraire de son patron.

Si un Muhutu reçoit d’un Mututsi des têtes de bétail en vertu du contrat dit d’ubugaragu (bail a cheptel) et si après quelques années, en vendant les taurillons, les peaux, les cornes, le lait, le beurre, il a gagné assez d’argent pour pouvoir acheter une tête de bétail, celle-ci n’est une imbata, mains une impahano.

Si un Muhutu Umugaragu d’un Mututsi marie sa fille et reçoit une vache à lait comme dot, celle-ci n’est pas une imbata, mais bien une inkwano et le shebuja du gendre peut la reprendre. En effet, c’est la situation sociale du Muhutu qui lui a valu de toucher une dot en bétail. S’il n’avait pas été client d’un Mututsi, il n’aurait reçu comme dot que des houes ou des chèvres.

INTUNDANO (de kutunda : faire le commerce).

Vache achetée au marché, avec le salaire gagné aux mines, contre des chèvres ou des paniers de haricots. Elle est imbata.

INDUNDU

Vache acquise immédiatement en pleine propriété sans condition pour l’acheteur de payer plus tard un supplément. Indundu s’oppose à Ingwate•

INKAZIBITI.

Vaches remises sans redevance par le patron à un client qui a fait sa cour (guhakwa). Prendre possession des vaches promises par le shebuja se dit : kujya ku irembo franchir le seuil du rugo). La première vache reçue dans ces conditions s’appelle inka y’igiti; la deuxième impetano; les autres ne portent pas de nom spécial. Un père peut donner aussi des inkaz’ibiti à ses femmes et à ses fils.

INGABANE.

Quand un Mututsi qui a fait sa cour auprès du Mwami reçoit de celui-ci une colline avec du bétail et des abagaragu, le dit bétail porte le nom de ingabane (de kugaban : recevoir’). Un troupeau d’ingabane comporte au minimum trente têtes : vaches, veaux, génisses, taurillons. Un simple Mututsi non pourvu d’un commandement politique peut recevoir des ingabane et des inkaz’ibiti. Mais la faveur du Mwami lui vaut d’être considéré comme un personnage important. 1I est umugaragu du Mwami. Les Bahutu ne reçoivent d’ordinaire que des inka z’ibiti.

INDEMANO(de kurema : créer, former rassembler)

  1. a) Vaches de même couleur et de même àge remises par un père à son fils quand celui-ci est sur le point de se marier. L’ensemble des indemano porte le nom d’iminani;
  2. b) Par un patron à un client qu’il affectionne et qui va se marier;
  3. c) Par un mari à sa femme.

Les indemano sont  aussi ingabane.

Les têtes de bétail restant au maître après ces différents partages forment l’ingarigari (les vaches réservées).

INGARIGARI

Vaches que le maitre conservepour sa satisfaction et ses besoins personnels sans en donner à ses femmes, ses fils, ses amis ou sans les donner à bail à des abagaragu.

INKUKE (de gukuura : enlever, ôter)‘)

a)Un fils qui a reçu de son père des indemano rend à son père une vache à lait (inkuke) prise parmi les indemano. Quand elle ne donne plus de lait, le père’ la renvoie chez son fils.

b) Un umugaragu mututsi a l’obligation d’envoyer chez le Mwami une inkuke prise parmi les ingabane qu’il a reçues. Quand la Vache ne donne plus de lait, le client doit amener d’autres bêtes.

c)Un umugaragu peut recevoir des indemano de son patron. En général, ce sont de vieilles vaches ou des taurillons qu’il échange alors contre des génisses. Quand elles sont adultes, il donne une ou plusieurs de ces inkuke à son patron.

d) Un umugaragu du Mwami doit envoyer de temps en temps à celui-ci une vache laitière prise dans les ingabane qu’il a reçues.

INDWANYI.

Taureau adulte fourni annuellement au Mwami par chaque chef de province et qui est sacrifié aux mânes ou qui sert de bête de boucherie pour les besoins du Roi, de ses Batwa ou de ses hôtes étrangers : Bahima, Barundi, Baganda, etc.

IBINIHA

Vache stérile fournie dans les mêmes conditions et destinée au même usage.

INTORWA

Taurillons ou jeunes béliers destinés à la consultation des augures ou au culte des ancètres.

YO KUBIKA.

Vache amenée au Mwami par le successeur d’un chef de province, qui vient lui annoncer la mort de son père.

IY’UBUNTU.

Vache donnée en cadeau. Elle appartient en pleine propriété à celui qui la reçoit; celui-ci n’est tenu à aucune obligation vis-à-vis du donateur. Les aches ubuntu ne sont pas ingabane; elles sont imbata, quand elles prennent place parmi les imbata qui se trouvent déjà dans le rugo et gardent le nom d’inka y’ubuntu, sans en posséder les privilèges, dans tous les autres cas.

INYITURANO

vache donnée en retour par celui qui a reçu une ubuntu. Quand un homme qui a gratifié d’ubuntu certains de ses amis meurt, ses enfants peuvent réclamer une vache inyiturano à chacun de ceux-ci.

IMPAHANO

Vaches achetées dans les memes conditions que les intundano, reçues en cadeau ou en dot. Elles ont le misque caractère que celles-ci, mais si leur possesseur se lie à un patron, elles deviennent « ipso facto n des vaches d’umugaragu.

INYARUREMBO

Vaches qui continuent à appartenir à un pasteur mututsi, mais qui peuvent se trouver chez une de ses femmes ou chez un umugaragu. Elles restent près de la demeure du maître, car elles sont destinées à fournir le lait nécessaire à l’alimentation de celui-ci et de sa famille. Les indemano remises par un propriétaire de bétail sont des inyarurembo. Les vaches achetées par un umugaragu mututsi (intundano) sont aussi inyarirembo. Au contraire, celles acquises par un Muhutu qui s’est engagé dans un contrat de clientèle deviennent ingabane.

INKWANO.

Vache à lait donnée ou reçue en dot poour le mariage d’une fille ou d’une soeur. Elle devient imbata.

INDONGORANYO

Tête de bétail donnée au jeune ménage par les parents de la femme et parfois aussi par les parents du mari. Chez les chefs, l’indongoranyo est remise aussitôt après le mariage en signe d’amitié. Chez les autres Batutsi, l’indongoranyo est donnée à la jeune femme par son père quand elle rend visite à ses parents après la naissance de son premier enfant.

IY’URUGORI

Vache à lait ou génisse qu’une jeune mère reçoit de son père ou de son beau-père, à moins qu’elle n’ait été gratifiée déjà d’une indongoranyo. En cas de rupture du mariage, l’urugori n’est pas réclamé à la famille de la femme.

IY’ICYARI

— La bru n’est pas autorisée à voir son beau-père pendant les premiers jours du mariage. En même temps qu’il lève l’interdiction, le beau-père peut donner une icyari au jeune ménage. Chez les Bahutu, la vache est remplacée par un mouton on une chèvre.

IY’IGISAGE

Vache donnée par un père à son fils quand celui-ci atteint six ou sept ans. A ce moment, on modifie la coiffure qu’il avait jusqu’alors (igisage) pour lui faire des amasunzu.L’enfantmuhutu reçoit au même age deux ou trois bananiers.

INKAMWA

Quand un père defamille meurt, un de ses fils ou de ses petits-fils est choisi pour mettre entre ses mains un pot de lait. La vache qui a donné ce lait s’appelle inkamwa. Elle est donnée à celui qui a placé le pot de lait entre les mains du défunt et n’est pas comprise dans le partage de la succession.

Cette vache ne peut être vendue ou tuée. Son croît n’est pas soumis à cette interdiction. Si elle meurt, elle est mangée par les Bahutu dans le rugo du propriétaire et les os y sont enterrés. Chez les Bahutu, un mouton joue le rôle d’inkamwa.

IY’UMUGANGU – A la mort du père de famille, l’aîné des fils égorge un taurillon, qui est mangé par la famille. La peau est portée par le fils aîné pendant deux mois pour que les vaches ne meurent pas, comme leur maître.

IY’UMURIRO et INSHUMBUSHANYO

1° Si la foudre a détruit le troupeau (ou même une bête) détenu par umugaragu, celui-ci peut obtenir de son shebuja l’umuriro (litt. : la vache du feu), à savoir une vache ou un taurillon.

Quand plusieurs vaches sont remises par le patron pour indemniser son client, la première s’appelle umuriro, les autres inshumbushanyo.

2° Si le patron dépouille son client de tout son troupeau pour le punir de l’inexécution de l’une de ses obligations, l’umugaragu sollicite la protection d’un autre shebuja, qui remet à son nouveau protégé une vache et un taurillon ou un taurillon seul.

IMPONOKE

Quand le troupeau du patron, du chef de province ou du Roi est décimé par la peste bovine (muryamo), les abagaragu donnent des vaches pour combler les vides causés par l’épizootie.

INDORANO (de kurora : voir).

A la mort de l’enfant, de la femme ou du frère du Roi, de même qu’en cas de deuil chez un grand chef, les chefs de province et, s’ils sont soumis directement au Mwami, les chefs de colline amènent chacun deux vaches chez le Mwami et, une seulement dans l’autre éventualité. Une vache est remise également par les abagaragu. La vache donnée à un ami à l’occasion d’un grand deuil s’appelle aussi indorano.

IMPONGANO.

1° Vache donnée pour apaiser la colère du Roi ou d’un chef de province.

2° Vache donnée à un familier du Mwami pour le remercier de son intervention auprès du Roi.

IZIMANO.

La première fois qu’un grand chef de province va en saluer un autre, l’hôte remet à son invité une vache à lait. De même si le Roi ou un chef de province se rendechez un de leurs abagaragu, ils se voient offrir un veau

INJISHYWA.

Vache qui accompagne un Mututsi noble se rendant chez un chef de province ou le Mwami pour affaires ou pour y faire sa cour. Elle est destinée à lui fournir le lait nécessaire à son alimentation.

INDAGIZO (de kuragira : donner en dépôt pour faire paître).

Vache que le déposant (uwaragije) confie à quelqu’un qui possède un pâturage meilleur que le sien, mais le dépositaire (uwaragijwe) ne devient pas umugaragu. Celui-ci doit renvoyer la vache quand elle a mis bas, mais il a droit au lait pendant deux mois si la vache est jeune et pendant quinze jours si elle ne l’est plus. Si le veau meurt, le dépositaire a droit au lait un jour sur quatre.

INTAHIRA (de gutahira : venir devant, précéder, tenir tête).

C’est la meilleure des vaches détenues par un umugaragu. Il la fait toujours marcher en tête du troupeau. Le détenteur peut prendre son lait (intagemura: litt. : conserver le lait pour soi), mais les veaux doivent retourner chez le propriétaire.

INGWATE.

Primus, qui possède un taurillon (inguzwa) ou une vache stérile (également inguzwa), demande à Secundus, qui a une génisse (ingwate), s’il ne veut pas consentir à un échange aux conditions suivantes:

a)Si la génisse a un veau femelle (umukangara), Primus gardera le produit et la mère pendant un temps à convenir, deux ans généralement. Secundus reprendra alors la vache et son veau et conservera en plus l’inguzwa.

b)Si la génisse a un veau mâle, Secundus le prend tout de suite et Primus garde la mère pendant deux ans. Le lait est partagé entre les co-contractants : Secundus a droit au lait pendant quatre jours, Primus pendant deux jours et le gardien pendant un jour par semaine.

c)Si la génisse meurt avant d’avoir donné un veau, Primus prend la dépouille et Secundus conserve l’inguzwa. Pour éviter que la génisse reste pendant deux ans chez Primus, Secundus donne à son co-contractant une vache pleine (ingenzura) et reprend l’ingwate et son croit (veau femelle ou mâle). Deux cas peuvent alors se présenter :

a) L’ingenzura accouche d’un veau femelle. Primus le réclame.

1°  Secundus accepte et reprend l’ingenzura;

2° Secundus refuse. Primus conseerve l’ingenzura, son veau et ne donne pas le lait, en attendant qu’une autre vache lui soit remise.

b) L’ingenzura met bas un veau mâle.

1° Secundus accepte de donner à Primus u umukangara et reprend la vache et son veau;

2° Secundus refuse. Primus garde l’ingenzura et son veau. Il ne rend ce dernier qu’après sevrage. Il attend que la vache donne un veau femelle.

IGICANIRO (L’igicaniro est, à proprement parler, le feu allumé dans le kraal pour protéger les vaches contre le froid).

Primus, désireux d’avoir un taurillon, donne en gage (kagwatirira) toutes ses vaches à Secundus, tout en les gardant chez lui. Après deux ans, Primus remet un veau femelle à Secundus. S’il refusait, Secundus serait en droit de prendre une vache à lait (gukubitira).

Si le contrat porte sur des chèvres, le fait pour Secundus de se payer soi-même en cas de refus de Primus porte le nom de gufatira.

INDABUKIRANO(de kurabukira, offrir un don d’avènement au chef).

1° A l’avénement du Roi, ses abagaragu et tous les chefs de province doivent lui donner chacun une ou deux vaches en hommage.

2° Quand un umutware w’intebe, on icibiri ou un igisonga sont nommés, les propriétaires de plusieurs têtes de bétail doivent lui offrir une vache. Les abagaragu ont la faculté, non l’obligation, de faire de même.

Quand le Roi ou un umutware destitue et dépouille un chef, les abagaragu du nouveau chef peuvent aussi lui donner chacun une indabukirano. Les Bahutu, eux, offrent des chèvres, des moutons, des houes.

INTORE.

1° Certains grands chefs possèdent, comme le Roi, un corps d’Intore (pages danseurs) (de gutora, prendre, ou gutorana, prélever, choisir).

L’enfant d’un riche Mututsi qui se rend chez un chef de province pour y devenir page y amène une vachey’intore. Celle-ci est donnée à l’umutware w’intore (commandant des pages), qui devient ainsi en quelque sorte le shebuja du père de l’enfant. Ce dernier n’est cependant tenu par aucun lien comme un client ordinaire

2° On appelle aussi intore les vaches données obligatoirement par les abagaragu à un Mututsi noble qui succède à son père comme chef de famille.

3° IMPOT EN VACHES.

INGORORANO (de kugororera : gratifier).

Vache donnée pour récompenser un guerrier de son courage ou pour un service rendu. Celui qui a bien soigné les vaches du maître(inyorurembo ou ingarigari) ou qui a bien cultivé ses champs peut recevoir une vache. Pour récompenser l’umutware w’intore de son enseignement, le père d’un page lui donne aussi une ingororano.

UMUHETO.

Vache prise grace à l’arc (umuheto). C’était le butin de guerre. Jadis on donnait aussi ce nom à l’impôt payé par les guerriers.

IMIGOGORO(de mugogoro, fatigue, ennui, imposition. Avant l’occupation belge, ces vaches étaient appelées imbyukuruke (litt: parade).

Vache envoyée tous les jours chez les blancs pour leur fournir du lait. Dans le Kinyaga (Shangugu /Cyangugu) et dans le Bugoyi, on l’appelle umuheto. Dans le Ndorwa, elle est appelée kibere.

IMBYUKUBUKE.

Vache de choix destinée à être montrée à un haut personnage en visite et à lui fournir du lait pendant le temps de son séjour.

IBIHEMBO.

Cadeau en vaches offert à la femme du Roi, d’un grand chef ou d’un patron quand elle a un enfant.

Le don fait par les Bahutu qui consiste simplement, en lait ou en bière se dit y’ibihembo.

INTIZO

1° Un homme dépouillé par un chef reçoit d’un ami une vache en prêt (intizo) en attendant que  justice soit rendue. Il se peut également que l’ami ne donne que du lait (intizo), parce que, en envoyantunevache, il montrerait ostensiblement son amitié et ainsi risquerait lui aussi d’encourir la colère dit chef.

2° Un propriétaire de bétail doit donner au moins une vache à lait à un gardien (umushumba) qui n’a pas le temps de cultiver pour son compte.

3° Un Muhutu qui cultive les champs d’un Mututsi reçoit du lait (intizo), soir et matin, de celui-ci.

4° Une vache est remise à deux cultivateurs qui se partagent le lait et les prestations à fournir en contre-partie (La traite d’une vache est égale au salaire d’un jour de culture).

IMPONGANO.

Vache donnée en réparation d’une faute ou offerte à titre de cadeau à celui (inshuti) dont l’intervention peut aider à faire gagner le procès.

INGURANO.

Vache de rachat donnée par un patron ou par un chef de famille pour éviter que le coupable soit condamné.

INKUNGURANYO(de gukunguranya. échanger deux vaches de valeur égale d’une manière définitive et irrévocable).

Primus, possesseur d’une génisse, s’adresse à Secundus pour  échanger la vache contre un veau femelle ou deux taureaux. Ils ne doivent rien donner en supplément pour avoir un droit absolu sur l’objet de l’échange, mais aucun d’eux ne conserve non plus la possibilité de reprendre la valeur échangée.

  1. Petits animaux domestiques.

Le Mwami possède un droit de propriété plutôt théorique sur le petit bétail, qui est considéré par les grands éleveurs comme étant sans valeur. En conséquence, les Bahutu ont la faculté de vendre ou de réserver pour leur consommation chèvres et moutons. La volaille appartient également aux Bahutu, qui ont l’obligation de fournir, sans rémunération, les poussins nécessaires aux sacrifices divinatoires. Les poules et les oeufs ne sont pas consommés par les indigènes et n’ont donc, sauf aux environs des postes européens, aucune valeur marchande.

Le petit bétail ainsi que la volaille sont la propriété exclusive des hommes. Les Banyarwanda tiennent beaucoup à leurs chiens de chasse. Des Batutsi vont jusqu’à payer une ou deux vaches pour un chien réputé pour ses qualités de chasseur.

  1. Autres biens mobiliers et immobiliers.

Chez les Batutsi, le mari et chacune de ses femmes habitent leur rugo propre, mais toutes ces demeures sont la propriété du mari. De même, chez les Bahutu, la hutte et ses annexes appartiennent au mari.

Les instruments de travail appartiennent au mari. La femme et les enfants ne peuvent les prêter sans son autorisation, sauf pour peu de temps. Les ustensiles de ménage fournis à l’épouse par le mari restent la propriété de celui-ci. Mais les ibirongoranywa c’est-à-dire les objets, ustensiles, vêtements, donnés par le père à sa fille au moment du mariage et qui peuvent atteindre parfois la valeur de plusieurs vaches ou consister même en vaches, appartiennent à la femme. Elle peut en disposer comme bon lui semble, sauf s’il s’agit de vaches.